Jessy Trémoulière, l’arrière du XV de France féminin, remplaçante sur la finale du Tournoi des Six Nations féminin et titulaire sur le Crunch du 30 avril à Villeneuve-d’Ascq (coup d’envoi à 21 heures), l’admettait sans fard en début de semaine. Oui au lendemain de la finale perdue, les corps des joueuses étaient « machés ». Au vu de l’engagement des tricolores, on n’en attendait pas moins.

Pourquoi donc enchaîner ces rencontres, au risque de les faire souffrir encore plus ? Car après le match contre l’Irlande à Dublin et la finale au Twickenham Stoop, cette troisième rencontre internationale en autant de semaines, mettant un terme à une aventure de six semaines n’arrive pas par hasard.

« Si on a choisi ce format-là, c’est que dans un an à la Coupe du Monde, c’est potentiellement ce qui peut arriver », explique Stéphane Eymard, entraîneur des arrières du XV de France féminin. 

« Dans un an, tu vas potentiellement jouer ton dernier match de poule contre les Anglaises et tu vas potentiellement jouer ton quart de finale derrière contre une grosse équipe, avec déjà un mois de compétition que tu auras vécu en amont et tu vas te retrouver exactement dans ce cas de figure. Jouer ce match-là, c’est anticiper, voir comment on digère les choses. En termes de résultat ou de titre honorifique, il n’aura pas la même saveur que celui de samedi dernier, c’est vrai. Mais en termes de projection, de panification, de comment on construit en groupe en prévision de la Coupe du Monde, il a beaucoup de sens. »

Une succession de matchs qui a du sens

Reste que l’adversaire n’est pas n’importe lequel : les Anglaises, que les Françaises n’ont plus battues depuis 2018.

« La succession de défaites contre l’Angleterre ne m’impacte pas ; ce n’est pas ça notre cap », assure Stéphane Eymard. « Forcément, six semaines ensemble avec de l’isolement, une bulle sanitaire qui a été hyper bien construite par notre médecin, forcément c’est compliqué pour tout le monde, on ne va pas s’en cacher.

« Mais comment, même si on est usé mentalement, comment malgré tout ça, on va réussir à produire une grande performance, c’est ça l’enjeu. C’est ça le plus important. Parce qu’on va le revivre, lorsqu’on partira à l’autre bout du monde pendant deux mois, on va le vivre ça. Et c’est pour cela que ça a du sens. »

« Il n’y a pas d’usure, même s’il y a le manque familial qui est là. Mais on est un bon groupe, on rigole bien, nous sommes toutes des copines », abonde la demie de mêlée Pauline Bourdon.

Une évolution constante

Pour le staff comme pour les joueuses, ce qui compte avant tout c’est l’évolution de cette équipe, même si celle-ci doit se faire par des défaites qui font mal.

« On a pris un coup sur la tête », concède Stéphane Eymard en faisant référence à la finale du Tournoi perdue la semaine précédente. « Ça a été difficile à encaisser pour les joueuses et pour le staff parce que ça fait deux fois que t’es un peu meilleur au rugby et, au bout du bout, la victoire t’échappe. Mais ça reste une étape intéressante pour nous.

« Je ne crois pas à un blocage mental. On a un problème d’immaturité d’expérience collective. Un exemple : le coup d’envoi de fin de match est joué avec une immaturité totale ! Tu la joues à l’envers de ce qu’on avait prévu, t’as même pas tes deux ou trois filles à la récupération, tu paniques… C’est une gestion de nos leaders de jeu qui sont en construction. La charnière par exemple, c’était leur deuxième ou troisième match ensemble. C’est ça qui nous manque. Je ne crois pas en un blocage mental. Ce qui m’intéresse, c’est notre construction à nous, notre propre jeu. Nous, on se construit pour demain. »

« Oui il y a une évolution parce qu’on a continué à travailler sur nos points faibles et nos points forts », ajoute Caroline Thomas qui fera son grand retour comme remplaçante après une année sans jouer avec les Bleues. « On a une évolution qui est menée avec tout le staff. On évolue sur chaque match, pas que sur les matchs contre l’Angleterre. On a fait des choses différentes et bonnes contre le Pays de Galles et contre l’Irlande aussi. Il y a une évolution à prendre sur la globalité. »

Avec huit changements dans l’équipe, en tenant compte des blessures (Lénaig Corson, Marjorie Mayans, Emeline Gros et Cyrielle Banet) et le renvoi de trois éléments vers le sept (Caroline Drouin, Carla Neisen et Jade Ulutule), plusieurs reviennent : Maëlle Filopon, Gabrielle Vernier, Morgane Peyronnet, Julie Annery, Elise Pignot et Jessy Trémoulière Joueuse World Rugby de la Décennie. De quoi encore avancer.

« Aujourd’hui, on commence à avoir tout. Après, il faut sortir le bon hameçon, piquer l’adversaire au bon moment. L’équipe sera métamorphosée oui, mais c’est un groupe France. Ce n’est pas une équipe de titulaires avec des secondes couteaux ; ça n’existe pas. C’est un groupe France qui est riche avec des jeunes, des expérimentées, des filles qui ont un double projet. C’est la richesse de notre groupe avec un cap commun », martèle Stéphane Eymard.

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