Pour qui connaît le rugby à sept et sa rigueur, décrocher une médaille aux Jeux olympiques relève non seulement de l’exploit, mais aussi de l’impensable lorsqu’on se replonge dans l’histoire de l’équipe de France il y a encore quelques années.

On est en 2012 lorsque Fanny Horta, l’actuelle capitaine de l’équipe de France, participe à son premier tournoi sur le World Series, à Dubaï. Elle avait goûté à la Coupe du Monde de Rugby à sept trois ans avant et ne s’est pas retrouvée là par hasard.

Mais à cette époque, aucune structure n’est en place, le sept est encore balbutiant en France et David Courteix est choisi comme coach de l’équipe de France en 2010. La première grosse échéance arrive à Moscou en 2013. La 11e place de l’équipe de France à cette Coupe du Monde de Rugby à Sept fait prendre conscience que la France peut rivaliser avec d’autres nations.

Dans les rangs, Marjorie Mayans, Pauline Biscarat, Camille Grassineau, Chloë Pelle ou Shannon Izar sont déjà là – les trois dernières sont toujours présentes aujourd’hui. Fanny Horat et Rose Thomas, une autre joueuse confirmée, montent à Paris rencontrer les dirigeants et s’ingénient à les convaincre qu’il est grand temps de mettre de l’ordre dans la discipline.

« On sentait qu'on pouvait faire quelque chose », raconte Fanny. « On avait la volonté et l'envie, sauf que c'était délicat. On a pris cette décision avec Rose : si on montait, on allait tout faire pour arriver à un but qui était de pouvoir s'entraîner continuellement. Au début, on s’est entraîné avec les garçons. Ça a été une période très compliquée sur le plan physique mais aussi très enrichissante. On a montré notre envie de jouer, de représenter la France, de faire des podiums comme maintenant. »

Percer les plafonds de verre

D’autant que dans le même temps le rugby à sept intègre le programme olympique. L’édition de Rio en 2016 sera la première. La France terminera 6e mais elle sait qu’elle est encore en construction. Coincée dans le ventre mou du World Series, elle s’en extirpe petit à petit, jusqu’à s’imposer comme finaliste de la Coupe du Monde de Rugby à Sept en 2018 à San Francisco remportée alors par la Nouvelle-Zélande.

Ce n’est pas l’envie et la volonté qui manquent à cette équipe expérimentée qui doit combattre ses démons et commencer à crever les plafonds de verre qui l’empêchent de monter. De précieuses et méticuleuses victoires sur l’Australie, la Nouvelle-Zélande (Kitakyushu 2019) et le Canada achèvent de convaincre les observateurs que cette équipe peut désormais battre n’importe qui.

A force de ténacité, la France utilisera ses trois chances pour se qualifier aux Jeux de Tokyo 2020, via le World Rugby Sevens Repechage organisé à Monaco, cinq semaines seulement avant le début des Jeux. Les Françaises iront jusqu’en finale. Qualifiées en même temps que les Bleues, les Russes ont dû se contenter de la 8e place à Tokyo.

Une finale olympique positive

La finale face aux Black Ferns Sevens ne s’est pas passée comme les filles l’espéraient. « On avait à cœur de mettre du rythme et de pouvoir imposer notre jeu et c'est vrai qu'avec très peu de ballons ça a été compliqué », reconnaît Fanny Horta.

« On a souvent manqué de ballon, c'est comme ça », ajoute pour sa part l’entraîneur David Courteix. « Je crois qu'on avait encore de la fraîcheur physique. Mais la Nouvelle-Zélande est un très, très beau vainqueur qui domine le rugby à sept depuis des années. Ce sont des joueuses intelligentes, performantes, très techniques, qui ont une vraie complicité, qui maîtrisent à merveille le jeu qu'elles mettent en place. »

Mais la médaille d’argent obtenue au bout brille d’un éclat particulier. « Cette médaille montre aussi tout le chemin qu'on a parcouru. Je pense qu'il faut se féliciter d'être sur le podium aujourd'hui », dit la capitaine qui sait très bien d’où elle vient.

Un nouveau chapitre à écrire

Après onze ans à ce poste, David connaît plus que quiconque la vraie valeur que revêt cette médaille tant espérée. Il voit en elle le moyen d’écrire un nouveau chapitre dans l’histoire du sept tricolore. « J’espère que ça va donner envie à plein de gens de jouer au rugby à sept. Je crois qu'il doit y avoir des discussions pour construite l'avenir olympique de cette discipline », dit-il.

« Là, il y a une médaille aux Jeux olympiques, c'est quelque chose d'exceptionnel. Il faut que le rugby prenne conscience de tout ça et du fait que l'olympisme a une place particulière dans le monde du sport. Il faut se rendre compte que le rugby est à nouveau un sport olympique, que c'est une chance inouïe, une exposition exceptionnelle pour son développement et ses valeurs.

« Tout le monde réalise ce qu'est un grand chelem, tout le monde réalise ce qu'est une Coupe du Monde de Rugby à XV. Peut-être qu'aujourd'hui il faut réaliser ce que c'est que de remporter une médaille olympique. »

Il observe avec envie l’essor qu’a pris le Sevens en Nouvelle-Zélande, où la discipline est au cœur du système. « C'est un booster de talent en Nouvelle-Zélande. En France aujourd'hui, le sept est en train de prendre un tout petit peu cette place. Le sept est à un tournant de sa vie », estime-t-il.

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