Kirby Sefo avait une grande chance de jouer pour l'Australie à la Coupe du Monde de Rugby 2021 jusqu'à ce qu'une blessure mette fin à sa carrière en février dernier. Sans emploi, l'ancienne Wallaroo a mis toute son énergie dans la création d'un programme destiné à aider les jeunes femmes sur et hors du terrain.

Kirby se souvient de cet instant qui a changé sa vie. C'était en février, il y a sept mois. Elle jouait pour les Queensland Reds en Super W lorsqu'elle a pris la balle derrière un maul et s'est retrouvée à terre sous le poids de deux piliers. L'impact et la chute ont laissé la trois-quart avec une orbite et un nez cassés. Elle a dû ensuite se faire poser des plaques de métal dans le visage.

Après avis médical, elle a décidé d'arrêter là les frais, après des mois difficiles. En décembre 2019, la jeune trentenaire avait quitté son travail de responsable de la communication et du rugby féminin à Sunnybank Rugby. De fait, elle s'est retrouvée avec plein de temps devant elle, ce qui lui a permis de formaliser un projet auquel elle pensait depuis un certain temps : Subbed, une organisation qui accompagne les jeunes filles confrontées à des problèmes de société.

« C'est une organisation à but non lucratif destinée aux filles et aux jeunes femmes de 12 à 24 ans », explique-t-elle à World Rugby. « On se sert du sport comme moyen de sensibilisation aux problèmes de société et de santé comme la santé mentale, la diversité culturelle, la sexualité et le relationnel.

« Le projet est né de mes expériences personnelles, en tant que sportive pro et semi-pro, et de conversations que j'ai eues avec des tas de personnes. Et c'est vraiment à partir de là que nous avons construit ce programme que nous proposons dans les écoles, dans les structures sportives et sur les lieux de travail. »

Les difficultés auxquelles elle a fait face

En 2014, Kirby Sefo est devenue la première Australienne à se voir proposer un contrat pro pour jouer à 7. Le déménagement du Queensland à Sydney et les ennuis financiers l'ont petit à petit plongé dans la dépression et l'anxiété. Elle n'a pas eu les mots pour en parler à ses proches et a dû renoncer à ses engagements avec l'équipe nationale après une seule sélection sur le HSBC World Rugby Sevens Series.

« Ça n'avait absolument rien à voir avec l'organisation ni avec Rugby Australia », précise-t-elle. « En fait, il y avait beaucoup de choses qui n'allaient pas. A ce moment-là, il n’y avait pas de dispositif en place qui pouvait répondre aux besoins des femmes qui évoluent dans un environnement professionnel. 

« Peu importe que vous soyez un garçon ou une fille, ça reste une situation difficile à affronter car, évidemment, vous voulez jouer et être sélectionné, partir en tournée et décrocher un contrat. C'est votre boulot et ce n'est pas simple d'en parler pour ne pas le compromettre. Avec la dépression qui pointait, c'était une période très difficile. Je vivais avec mes coéquipières, mais je ne pouvais pas en parler. »

Créer un endroit sûr

C'est après cela que Kirby est retournée dans le Queensland et a commencé à travailler à la cellule développement de son club, Sunnybank, avec des jeunes filles. Ainsi s'est concrétisée l'idée de développer Subbed.

« J'ai acquis une connaissance plus fine du moment où commencent de genre de problème : dès les premières années de l'adolescence », assure-t-elle. « Je m'occupe de filles qui ne font partie d'aucun programme de haute performance et, selon moi, le sport me semble être la bonne solution et un espace sécurisé.

« C'est bien pour elles de s'investir dans le sport, d'avoir un bon relationnel et surtout des relations saines, qui ne soient pas toxiques, de les croiser au club et à l'école. La raison pour laquelle j'ai tiré l'âge jusqu'à 24 ans, c'est que lorsque ces filles sortent de l'école, sortent d'un cadre précis et d'une routine, souvent elles peuvent retomber. Donc si vous pouvez les faire rester dans un cadre sportif, une fois encore vous leur proposer un environnement sain. C'est quelque chose que Subbed peut faire pour les aider. »

Le programme de Kirby Sefo se déroule sur trois ou six semaines. Avant que la pandémie n'éclate, plusieurs écoles de Brisbane s'étaient déclarées intéressées. Ces perspectives sont maintenant reportées à l'année prochaine, mais Subbed poursuit sa mission grâce notamment à un podcast dans lequel la jeune fille interroge des sportives de haut niveau.

« Mon plus grand souhait serait que Subbed devienne le programme le plus prisé non seulement pour les filles dans le sport, mais aussi pour les filles en général. Si nous pouvons réussir à rendre les gens meilleurs, alors nous pourrons rendre les joueuses meilleures. »

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