La voix légèrement rauque après avoir suivi une séance d'entraînement avec l'équipe nationale de Namibie, Allister Coetzee a accordé mercredi un entretien à World Rugby à propos de son retour à l’international.

A 58 ans, il s’était mis en retrait après avoir perdu sa place d'entraîneur des Springboks en décembre 2017. Et la dernière fois qu’il avait entraîné avant l’épidémie de Covid-19 c’était au Japon avec les Canon Eagles.

Mais après avoir passé l'année dernière en Afrique du Sud avec sa famille pendant ces périodes troublées, Coetzee est ravi d'être à nouveau sur le terrain et de retravailler en direct avec des joueurs de haut niveau.

« C'est la première fois que je reviens sur le terrain, c'est pourquoi ma voix est un peu éraillée », s’excuse-t-il. « Mais ça me fait du bien d’être de retour sur le terrain et de travailler avec un groupe de joueurs enthousiastes.

« Je les ai rencontrés pour la première fois il y a quelques jours à Addis-Abeba, en Éthiopie, après avoir pris l'avion directement du Cap et la correspondance (vers la Côte d'Ivoire). Je n'ai jamais travaillé avec aucun des joueurs ou des membres du staff auparavant, mais la façon dont nous nous sommes vite intégrés s'est bien passée et ça se passe bien. »

Un nouveau capitaine

L'une des premières décisions de Coetzee a été de nommer le troisième-ligne aile Pieter-Jan Van Lill capitaine pour les prochains matchs de la Coupe d'Afrique. Le match de ce samedi 3 juillet contre la Côte d'Ivoire et celui contre Madagascar le mercredi suivant serviront également pour les qualifications à la Coupe du Monde de Rugby 2023.

« Nous serons mis à l'épreuve, j'en suis sûr. Si c'était en Namibie, à Windhoek, alors peut-être que nous aurions été favoris. Mais venir ici est différent », relève l’entraîneur.

« Je n'ai pas vu jouer la Côte d'Ivoire ou Madagascar, on n’a pas d'analyse vidéo. Mais je sais que les Ivoiriens sont assez nombreux et que certains de leurs joueurs évoluent en Pro D2 en France, donc ce ne sera pas une promenade de santé et ce sera un vrai test pour cette équipe qui n'a plus joué ensemble depuis la Coupe du monde. »

Pieter-Jan Van Lill, dont le club de Vannes a raté de peu la promotion dans le Top 14 en France, sera secondé par Lesley Klim, l'ailier qui évolue dans le deuxième tier d’Angleterre avec les Jersey Reds.

Les deux joueurs ont participé à la Coupe du Monde de Rugby 2019 et formeront la colonne vertébrale expérimentée de l'équipe lors du prochain tournoi en France – si les Welwitschias y parviennent.

S’appuyer sur les bases solides de Phil Davies

« C'est un grand honneur et un privilège de pouvoir à nouveau aider au niveau international », assure Allister Coetzee. « C'est un gros travail et je pense que la chose la plus importante est de s'assurer que la Namibie se qualifie pour la Coupe du Monde de Rugby 2023. »

Selon lui, compter sur une vraie compétition et disposer d’un bon profil d'équipe seront deux facteurs clés de leur parcours au cours des deux prochaines années.

Il précise que l'accent sera mis sur l'évolution et non sur la révolution, car il entend s'appuyer sur les bases solides mises en place par le Gallois Phil Davies qui a supervisé les deux dernières des six campagnes de la Namibie en Coupe du Monde de Rugby à ce jour.

« Phil a posé de bonnes bases ici et, d'après ce que j'ai vu et entendu, beaucoup de bonnes choses ont été faites », reconnaît Coetzee. « Nous n’allons pas redécouvrir la gare de Pontoise et tout recommencer, nous devons prendre en compte la stratégie qui a fonctionné et nous appuyer dessus.

« Au cours des deux prochaines années, mon objectif principal sera de m'assurer que nous disposons d’une équipe de joueurs prêts à représenter leur pays lors de la prochaine Coupe du monde. Je pense que la composition de l’équipe est très importante, pas trop vieille mais qui a suffisamment d'expérience.

« Je pense que c’est ce que voudrons les autres équipes internationales aussi et elles apporteront du sang neuf pour les deux prochaines années. Nous avons un assez bon groupe de jeunes joueurs et je les suivrais jusqu’en 2023. »

Ne pas être ridicule en Coupe du Monde de Rugby

Coetzee souhaite également exposer ses joueurs à un bon niveau de compétition en dehors des fenêtres internationales, en particulier pour les joueurs qui sont restés en Namibie. Dans le passé, la Namibie avait d’ailleurs profité de la présence d’une franchise en Currie Cup, les Welwitschias XV, et Coetzee aimerait que cela se reproduise.

« Le seul hic à ce stade est que nous n'avons pas assez d'occasions de jouer dans une ligue ou une compétition comme les Fidjiens ou les Samoans », regrette l’entraîneur, faisant référence aux équipes de Fidji Drua et Moana Pasifika qui devraient être impliquées dans une nouvelle compétition en Nouvelle-Zélande.

« Malheureusement, nous sommes dans une situation où nous ne jouons même pas en Currie Cup. Il est extrêmement important que nous jouions dans des compétitions comme celle-là et j'espère que cela pourra être possible en 2022.

« C'est ce dont cette équipe a besoin pour progresser et pas seulement être brillante pendant 40 minutes contre les All Blacks et ensuite ne pas être en mesure de garder le rythme. »

Sous Phil Davies, la Namibie avait été l'équipe la moins bien classée de la Coupe du Monde de Rugby 2015, mais avait réalisé un certain nombre de bonnes performances.

Les Welwitschias n’avaient pas été ridicules en s’inclinant 58-14 contre les All Blacks et avaient remporté leur tout premier point en Coupe du Monde de Rugby après avoir perdu contre la Géorgie par le plus petit écart de points.

Apprendre ou gagner

Coetzee a connu l'apogée à la Coupe du Monde de Rugby en 2007 lorsqu’il faisait partie du staff des Springboks devenus champions du monde avec Bryan Habana en France.

Inutile de dire que les ambitions de la Namibie ne seront pas aussi élevées que celles des Springboks s'ils parviennent à se rendre en France, d'autant plus que le pays qualifié comme Afrique 1 se retrouvera dans la même poule que les All Blacks, la France, l'Italie et Amérique 1.

« C'est comme ça, nous ne pouvons rien y faire. Nos objectifs ne changeront pas, nous voulons juste gagner un match », prévient Coetzee. « L’équipe a progressé en 2015 et en 2019, ils ont ciblé le Canada, mais ce match a été annulé en raison du typhon au Japon.

« Avec les Coupes du monde, il faut parfois un peu de chance. Je me souviens en 2007, l'ailier gauche (Mark) Cueto avait marqué dans le coin mais Danie Rossouw avait mis le pied sur la ligne. »

Chacun s’était remis en question, mais cette expérience a donné de bonnes leçons à suivre.

« Parfois les choses ne vont pas dans votre sens, mais l'adversité a simplement rendu les gens plus forts, donc tant que vous apprenez, alors vous n'êtes pas un perdant, vous êtes toujours un gagnant - vous gagnez ou vous apprenez, et cela a toujours été ma philosophie », dit-il.

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