L'arbitrage est souvent considéré comme un acte solitaire, voire un sacerdoce pour cet arbitre qui, armé de son sifflet, tente de maintenir la paix sur un terrain pendant 80 minutes.

Les arbitres de la Rugby Football Union Sara Cox et Nikki O'Donnell ont une riche histoire en commun. Elles se sont rencontrées pour la première fois lors d'un tournoi scolaire à Sheffield en 2007.

Depuis lors, le duo a gravi les échelons et toutes les deux ont été sélectionnées pour faire partie du panel des officiels de match sur le Tournoi des Six Nations féminin de ce mois-ci.

« Nikki et moi, nous avons en quelque sorte vu le rugby, et en particulier le rugby féminin, prendre son envol et commencer à décoller », raconte Sara Cox à World Rugby. « Vous rencontrez toujours les mêmes personnes et nous sommes arrivées sur le même tournoi en 2007.

« Et puis on continue et on se retrouve sur un autre tournoi, puis tout d'un coup dans le même groupe d'arbitres. Et puis ça continue comme ça. »

« Deux trajectoires complètement différentes »

Sara Cox et Nikki O'Donnell ont emprunté des chemins très différents avant d’arriver sur ce tournoi à Sheffield. Sara était une joueuse suffisamment bonne dans sa jeunesse pour qu’on lui donne sa chance pour l’Angleterre. Nikki, elle, n'a découvert le rugby qu'à l'université et a pris le sifflet pour se familiariser avec les règles.

C’est Sara Cox, cinq ans plus jeune que Nikki, qui a obtenu sa première sélection internationale quand elle a été retenue dans l’équipe des officiels de match à la Coupe du Monde de Rugby 2010, à l’âge de 20 ans.

Depuis, elle a officié sur France 2014 et Irlande 2017, sur le HSBC World Rugby Sevens Series, aux Jeux Olympiques, en Premiership et a supervisé un test-match masculin. En 2016, Sara Cox est devenue la première femme arbitre à être engagée par la RFU.

« Nous avons deux trajectoires complètement différentes », constate Nikki O'Donnell. « Ce qui est bien, c'est que Coxy est là, elle brise régulièrement des plafonds de verre.

« Tout le monde la remarque, bien plus que moi. Pour le rugby, et pour moi, cela crée des opportunités et cela vous fait réaliser qu'en fait, on peut toujours aller plus loin, toujours faire plus, qu’il y a encore tellement de choses que l’on peut faire. 

« Nous avons de jeunes arbitres très prometteurs, hommes et femmes, qui arrivent. Et ils voient les gens comme Sara et les autres à temps plein - et certains qui sont également à temps partiel dans cette configuration professionnelle - comme un but à atteindre si vous vous y engagez et que vous travaillez dur. »

Nikki O’Donnell a officié sur son premier match international, en tant qu’arbitre assistante, lors du Six Nations féminin 2013. Et depuis, les deux ont fait partie de la même équipe d’officiels de match sur six tests, ainsi que sur plusieurs tournois de rugby à sept.

« Il y a certainement eu des moments où Nikki m'a traînée sur des tournois, s'est assurée que j’étais toujours partante », sourit Sara Cox.

« Le tout c'est d’avoir un visage familier et d’être capable de rebondir, d’échanger, de confronter les points de vue, d’être sûre que, le soir, on a quelqu'un qu’on peut appeler si on a besoin d'aide pour quelque chose. Et avoir ce rapport rend déjà les choses un peu plus faciles. »

Etudier pour préparer la suite

Étant à temps plein, Sara Cox est en mesure de consacrer plus de temps à l'entraînement et à la préparation des matchs que beaucoup de ses collègues. Mais elle essaie aussi de maximiser au mieux son temps et étudie pour une maîtrise en psychologie à l’Université d’Édimbourg, depuis son domicile à Exeter.

« Je veux être sûre d’utiliser mon temps libre à bon escient pour me familiariser avec le milieu universitaire, pour apprendre de nouvelles choses et ainsi je peux réellement rebondir plutôt que de me dire que j’ai été arbitre professionnelle et que je ne sais rien faire d’autre. Au moins maintenant, je peux dire que j'ai autre chose à côté et que je peux avancer. »

En tant que capitaine dans le Queen Alexandra’s Royal Army Nursing Corps, Nikki O'Donnell est reconnaissante envers sa responsable qui s’est révélée compréhensive et qui lui permet de s'adapter pour assurer ses engagements en matière d’arbitrage.

« Chaque semaine me semble différente », explique-t-elle. « La plupart de mon temps est passé au service des urgences et je travaille mes quarts en fonction de mes obligations lorsque je dois me déplacer.

« Si j'ai besoin de renforcer l’équipe, d'utiliser un peu de congé annuel ou d'utiliser un peu de mon temps administratif militaire pour avoir cette flexibilité, mon boss me facilite la vie.

« Mais mon travail principal est bien de travailler pour l’armée que ce soit sur des shifts de bonne heure, assez tard ou sur de longues journées. Jusqu'à présent, j'ai évité les quarts de nuit cette année, ce qui est assez agréable pour essayer de trouver un équilibre avec les entraînements. Il s’agit d’adapter les à-côtés au travail et non l’inverse. »

Être exemplaires

Sara Cox et Nikki O'Donnell doivent arbitrer le week-end prochain, lorsque la phase de poule du Six Nations féminin 2021 touchera à sa fin. Sara se trouvera à Dublin pour Irlande v France et Nikki à Glasgow pour Écosse v Italie.

Les deux espèrent apporter à tous ceux qui regardent et qui souhaitent basculer dans le rugby des figures exemplaires.

« Personnellement, je constate qu’il y a de plus en plus de gens qui souhaitent s’investir dans le rugby et je pense que c’est le plus important », affirme Sara Cox.

« Ce n'est pas à moi de valoriser un genre ou une communauté en particulier. Mais c'est à moi de m'assurer, et je suis presque sûre que c'est la même chose pour Nikki, que nous faisons avancer l'arbitrage, que l’on renvoie le message qu’on peut s’investir dans le rugby de différentes manières.

« Il ne s'agit pas seulement de jouer, il ne s'agit pas seulement d'arbitrer, mais aussi de s’impliquer, même en coulisses. Les choses que vous ne voyez pas toujours, mais qui sont essentielles, c’est là-dessus que nous travaillons, Nikki et moi.

« Sans le sponsoring commercial, sans l'équipe des médias, sans le côté administratif, nous ne pourrions pas nous rendre sur le terrain, nous ne pourrions pas réaliser cette performance. Il faut bien comprendre qu’il y a cette grande famille de rugby dans laquelle vous pouvez vous investir.

« Et, si quelqu'un fait attention à moi-même ou à Nikki, à ce que l’on fait sur le terrain, si ça lui donne envie de s’investir et de mettre les mains dans le moteur aussi, alors j’aurais le sentiment d’avoir été utile. »

Et s’il y avait un conseil que Nikki et Sara pourraient donner à des aspirants arbitres, ce serait tout simplement : « Foncez ! Allez-y ! Ce sera difficile, ce sera amusant, mais vous apprendrez quelque chose sur vous-même. »

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