Au cours de cette semaine de repos dans le Tournoi des Six Nations, joueurs, entraîneurs et fans se penchent sur les performances de leur équipe. Il en va de même pour les équipes médicales. Tout au long de la dernière quinzaine, il y a eu beaucoup de débats dans les médias au sujet des commotions cérébrales et je souhaitais partager mon point de vue.

La commotion cérébrale est une lésion cérébrale et le rugby prend cette problématique extrêmement au sérieux. C'est pourquoi nous privilégions l'opinion d'experts et nous entendons ce qui se dit dans le monde entier. Nous nous félicitons des débats constructifs et nous prenons en compte toutes les opinions.

La science des commotions cérébrales et de la santé cognitive à long terme est extrêmement complexe et les points de vue divergent. Les connaissances scientifiques et la compréhension sociétale continuent d'évoluer, et le rugby évolue avec elles, toujours guidé par un consensus médical et scientifique pour éclairer nos stratégies de formation, de prévention et de gestion des commotions cérébrales.

Cet engagement est fermement appliqué pendant ce tournoi. Nous avons déjà eu des cas de jeu dangereux impliquant un contact avec la tête et des joueurs ont été sanctionnés. Cela fait partie de notre stratégie visant à changer le comportement des joueurs et des entraîneurs par des sanctions sévères définies dans le cadre décisionnel pour les plaquages hauts, et les arbitres jouent leur rôle.

Comment fonctionne le protocole de Reprise Progressive du Jeu pour les Commotions de World Rugby
World Rugby Chief Medical Officer Dr Éanna Falvey explique le protocole de Reprise Progressive du Jeu après une commotion présumée.

Nous avons également vu plusieurs joueurs éloignés du terrain pour un protocole commotion (HIA). Ceci est essentiel pour identifier la nature des blessures à la tête au cas où le diagnostic ne serait pas évident. En se basant sur un protocole clair établi par World Rugby, les équipes médicales utilisent plusieurs techniques pour définir une suspicion de commotion cérébrale, ce qui empêche un joueur présentant des symptômes clairs de revenir sur le terrain. La précision du protocole commotion est d'environ 92%, soit le double du taux de réussite des techniques précédentes et aussi précise qu'une IRM pour les blessures à l'épaule.

Après une commotion cérébrale, et une fois qu'il n'y a plus de symptôme, les joueurs doivent suivre le protocole de retour progressif au jeu en six étapes, établi par World Rugby, avant d’être autorisés à participer à un entraînement avec contact ou à un match. Contrairement à certains rapports, il n'y a pas de délai fixé pour compléter les six étapes. Par exemple, actuellement, les deux tiers des joueurs victimes d'une commotion ne jouent pas la semaine suivante, et beaucoup ne reviennent pas dans les trois semaines suivant leur commotion.

Pour avancer, un joueur doit justifier de l'absence de symptôme ou de signes de commotion cérébrale à chaque étape avant de passer à la suivante. Il doit également procéder à un examen neurocognitif pour égaler ou améliorer son score de base. Ce processus est supervisé par des médecins d’équipe qui sont leaders dans leur domaine et n’agissent que dans l’intérêt de la santé du joueur.

La participation du monde amateur est la pierre angulaire de toutes les formes de sport en dehors du niveau élite, et le processus de retour au jeu ne peut commencer qu'une fois que le joueur a achevé une période de repos physique strict - sept jours pour les adultes et 14 jours pour les enfants et les adolescents. - et uniquement si le joueur ne présente aucun symptôme.

Pour en revenir au Six Nations, le cas le plus médiatisé à ce jour a peut-être été celui de Johnny Sexton. Je suis persuadé que la plupart des Irlandais seront d’accord, beaucoup trop de personnes ont commenté son cas. Il est facile d’être un expert médical dans un fauteuil, mais ce que j’ai pu constater, c'est qu'un protocole efficace a été appliqué.

Johnny Sexton a été définitivement éloigné du terrain. Ensuite, le protocole de retour progressif au jeu a accompagné son rétablissement ; Johnny étant finalement indisponible pour le match du dimanche. Ces décisions ont été prises par l'équipe médicale irlandaise experte qui a pris en compte ses besoins individuels, suivant un protocole établi par World Rugby et ses parties prenantes.

Dans tous les domaines de la médecine moderne, on a recours à des soins individualisés. Cette philosophie est également adoptée dans le sport et chaque joueur est considéré comme un individu. Les décisions objectives sur les traitements sont prises en fonction des symptômes, des antécédents médicaux, du profil de risque et de la réponse apportée à chaque étape du protocole de retour au jeu. Aucun joueur ne doit retourner jouer à moins d'être prêt à 100%, quel que soit le temps que cela peut prendre.

Ces protocoles en constante évolution ont fait du rugby un leader dans la gestion du risque de commotion cérébrale dans le sport. Mais ce n'est pas suffisant. Je veux laisser ce sport dans une position encore plus forte qu'aujourd'hui. Pour ce faire, nous devons continuer à adopter la technologie, intégrer les dernières connaissances, travailler avec les représentants des joueurs, et commander, financer et collaborer à des projets de recherche au profit des joueurs à tous les niveaux. La semaine dernière, nous avons lancé notre processus de candidature 2021 pour les demandes de financement de la recherche, et nous avons investi près d'un million d'euros dans ce domaine depuis 2015.

Je suis médecin-chef de World Rugby depuis janvier 2020. Avant cela, j'ai travaillé avec les British & Irish Lions, avec l'Irlande et le Munster. Mais avant tout, je suis médecin et père de famille. Ces deux rôles comportent une grande responsabilité et éclairent tout ce que je fais à World Rugby. Je me soucie profondément de nos joueurs et mon travail consiste à me servir des dernières avancées scientifiques et médicales pour rendre le rugby aussi sûr que possible, afin que mes enfants et les vôtres puissent profiter des bienfaits du rugby pour les générations à venir.

Dans toute la communauté du rugby, à la fois élite et amateur, il y a des centaines de professionnels de la santé qui partagent cet objectif. Nous travaillons ensemble pour améliorer le jeu que nous aimons avec tout le sérieux nécessaire. Ils font partie d'une grande équipe qui travaille pour protéger et améliorer la santé et le bien-être des joueurs. Telle est notre mission et notre priorité.