La Coupe d'Automne des Nations s'est terminé jusqu'au bout du bout, dans le temps additionnel, avec la victoire de l'Angleterre 22-19 à Twickenham face à 2 000 spectateurs privilégiés dimanche 6 décembre 2020.

Après avoir remporté le Tournoi des Six Nations en octobre, l'équipe d'Eddie Jones a déposé un nouveau trophée sur son étagère après que le capitaine Owen Farrell ait fait preuve de sang froid pour taper la pénalité de la gagne après plus de 90 minutes de jeu.

La France s'est inclinée dans le résultat final avec amertume mais a sans conteste gagné en confiance et en consistance tout au long de cette campagne dont elle a su tirer le meilleur pour la suite. Ce qui n'a pas été forcément le cas d'autres équipes.

L'Angleterre gagne de justesse

Après avoir remporté le Tournoi des Six Nations, l'Angleterre a ouvert sa campagne de la Coupe d'Automne des Nations par une large victoire 40-0 sur la Géorgie à Twickenham. De chez eux, les supporters ont pu voir pour la première fois Jack Willis avec le maillot blanc et rouge sur le dos et le flanker des Wasps a salué à sa manière la confiance qu'avait placé en lui Eddie Jones en marquant le premier essai.

Les Anglais ont passé six essais au total. Jamie George est devenu le premier talonneur de l'Angleterre à inscrire un triplé. « On était revenu à Twickenham, même si la foule nous a manqué considérablement. Mais on a constamment poussé et c'était génial de passer la ligne », a-t-il dit.

Prochaine étape sur la route de l'Angleterre, l'Irlande où cette fois c'est Jonny May qui a fait les gros titres. L'ailier a marqué les deux essais de son équipe dans les quatre premières minutes pour l'emporter 18-7.

L'Angleterre a joué son troisième et dernier match de la Poule A par sa seconde victoire sur le Pays de Galles en 2020. Les visiteurs ont su rebondir après un essai de Johnny Williams à Llanelli par des essais de Henry Slade et Mako Vunipola, tandis que Owen Farrell a passé 14 points. Il aurait pu en passer plus, mais il a manqué trois coups de pied.

Farrell a également eu du mal sur le match suivant à Twickenham face à la France. Alors que la fin du match approchait, le XV de France menait toujours 19-12. C'est alors que Luke Cowan-Dickie a pu passer la ligne et Farrell cette fois n'a pas tremblé pour égaliser et poursuivre la rencontre dans le temps additionnel.

C'est alors que l'ouvreur anglais a tapé un poteau, laissant encore un espoir aux Français de gagner. Mais une autre pénalité a finalement réussi à passer et le score s'est figé 22-19.

La France a commencé à construire son avenir

Fabien Galthié, le sélectionneur de l'équipe de France, voulait profiter de la Coupe d'Automne des Nations pour construire après un Tournoi des Six Nations prometteur pour redevenir, comme il l'avait dit, une grande nation du rugby.

La difficulté a été de faire tourner son effectif de manière pertinente pour respecter les accords de disponibilité des joueurs avec les clubs. Mais l'annulation de son premier match contre les Fidji pour cause de coronavirus lui a offert du temps et permis d'aligner une grosse équipe face à l’Écosse, seule équipe contre laquelle les Français avaient chuté dans le Tournoi des Six Nations 2020 (28-17 à Murrayfield). Cette fois, Virimi Vakatawa a aidé à pousser la victoire à 22-15, ce qui était la toute première à Édimbourg depuis 2014.

Contre l'Italie, Galthié avait choisi de transmettre le brassard de capitaine à Baptiste Serin, Charles Ollivon devant laisser sa place. La rencontre au Stade de France avait un parfum particulier quelques jours après la mort brutale de l'ailier légendaire Christophe Dominici dont le portrait recouvrait les tribunes vides. Un magnifique essai de Gabin Villière complétait l'hommage à Domi dont le nom était écrit sur chaque manche des joueurs. C'était l'un des cinq essais de la soirée qui a consacré une jeune garde pour un score de 36-5.

A Twickenham le week-end suivant pour la finale face à l'Angleterre, le demi d'ouverture Matthieu Jalibert n'a pas faibli face à son idole Owen Farrell, transformant l'essai de Brice Dullin et passant deux pénalités pour mettre la France à 13-6 à la pause. Louis Carbonel l'a ensuite remplacé avec le même succès pour arriver à 19-12 alors que le temps était quasiment écoulé.

Mais l'Angleterre a su revenir de la façon dont on sait. « Fierté et frustration », lâchait Brice Dullin pour résumer en deux mots la rencontre. « Tactiquement, on a bien rivalisé et il y a cette fin de match et cette prolongation qui sont en notre défaveur. Mais c’est beau ce qui a été produit en seulement deux semaines ensemble. Il y a de la satisfaction, de bonnes choses. C’est dommage. »

« C’était incroyable, très serré », a commenté le deuxième-ligne Guillaume Ducat. « On a montré beaucoup d’enthousiasme et de maturité mais malheureusement, cela n’a pas payé à la fin. Les arbitres, ils sont là pour ça. Il n’y a rien à dire sur leurs décisions. On a tout donné mais cela n’a pas payé. On est quand même très fiers de ce qu’on a fait. Rivaliser avec les vice-champions du monde, c’est quand même une grande fierté. Ils ont été déstabilisés parce qu’on a fait un grand match. Au niveau de l’engagement et de l’agressivité, sur ce match-là on était au-dessus ».

Fier des jeunes Bleus à qui il avait donné une chance, le sélectionneur Fabien Galthié a eu ces mots : « On a livré un match cohérent vu l’investissement du groupe France depuis lundi. On a réussi à mettre les joueurs dans les meilleures conditions possibles, que ce soit physiquement ou mentalement mais aussi stratégiquement. Mais l’état d’esprit ne suffit pas. Il faut un peu de stratégie sur les situations difficiles à gérer. Un gros travail technique sur les collisions, les positions autour des rucks... Les deux s’auto-alimentent. Le rugby de haut niveau, c’est saisir les occasions quand elles se présentent. Je crois que les joueurs étaient dans cet esprit là. On est là pour révéler les joueurs. On a le parcours du développement du joueur, ils sont rentrés à corps perdu dedans. Ils ont avancé très vite. C’est à l’image de la semaine qu’ils ont fait et de la semaine précédente aussi. N’oublions pas que le rugby international, c’est d’abord l’affaire d’expérience collective. »

Le mot qui résumait cette belle expérience est venue du Champion du Monde avec les Bleuets qui a fait ses débuts internationaux sur la Coupe d'Automne des Nations, le troisième-ligne Cameron Woki : « C’est pas la farce française mais la force française. Aujourd’hui on a juste voulu montrer qu’il n’y avait qu’un seul groupe France : pas de France B, pas de France C. On est un groupe. On a montré qu’on pouvait rivaliser contre l’Angleterre donc on peut être fiers de nous. »

L'Irlande en transition

 Pour une équipe d'Irlande en transition, il reste encore beaucoup de questions en suspens après une première année sous les ordres d'Andy Farrell. Mais cette Coupe d'Automne des Nations a permis à l'entraîneur de repérer certains joueurs, lançant 11 nouveaux talents au cours des neuf tests qu'il a dirigé en 2020. James Lowe, Caelen Doris et Jamison Gibson-Park en font partie et seront dans les plans futurs de l'Irlande.
Un élément qui reste constant entre l'héritage de Joe Schmidt et ce que veut mettre en place Andy Farrell, c'est la capacité de l'Irlande a garder inviolée la forteresse de l'Aviva Stadium. Les victoires sur le Pays de galles (32-9) et la Géorgie (23-10) en témoignent, portant à 20 sur 21 le nombre de victoires en quatre ans à Dublin.

Sur son seul match à l'extérieur, l'Irlande s'est heurtée à la puissance de feu des Anglais à Twickenham. Jacob Stockdale a inscrit son deuxième essai pour sa deuxième sélection, ce qui augure du bon pour la suite, après un début tonitruant sur le Six Nations 2018.

Dans le match pour la troisième place face à l’Écosse, les Irlandais ont commencé en mauvaise posture face à des Écossais qui ont maîtrisé la première demi-heure, menant 9-6. Mais le jeu clinique des Irlandais a permis d'inverser la tendance. Keith Earls, deuxième meilleur marqueur d'essais de tous les temps pour l'Irlande, a encore amélioré sa performance et, avec Cian Healy, le XV du Trèfle a passé 19 points sans réponse pour gagner 31-16.

Un coup d'arrêt pour l’Écosse

L’Écosse avait débuté sa campagne de la Coupe d'Automne des Nations dans de bonnes dispositions après une série de quatre victoires de suite et la plus grosse défense du Tournoi des Six Nations 2020. Mais la dernière victoire du Tournoi contre le Pays de Galles à Llanelli avait coûté cher avec le forfait des ouvreurs Finn Russell et Adam Hastings pour la Coupe d'Automne des Nations.

Duncan Weir a été titulaire en 10 contre l'Italie à Florence pour son premier tests en quatre ans et demi. Mais à la pause, les Italiens menaient 11-7. Il a fallu attendre la puissance de Duhan van der Merwe, auteur du premier essai et soutien sur le deuxième de Zander Fagerson, pour pousser jusqu'au quatrième essai par George Turner et atteindre la victoire finale 28-17.

Huit jours plus tard à Murrayfield, l’Écosse a mis fin à sa plus longue série de victoires depuis 2011 par un essai de Vakatawa – le seul de la rencontre – lors de cette première victoire française à Édimbourg depuis 2014. La pandémie de Covid-19 a en revanche eu raison du troisième match contre les Fidji, remporté sur tapis vert. Mais contre l'Irlande à Dublin le week-end suivant, l’Écosse a échoué à finir dans le Top 3 malgré ce que l'entraîneur Gregor Townsend a considéré comme les 35 premières minutes de son meilleur rugby.

Le difficile Wayne's World avec le Pays de Galles

Campagne décevante du Pays de Galles dans cette Coupe d'Automne des Nations malgré l'émergence de nouveaux talents tels que les troisième-lignes Shane Lewis-Hughes et James Botham.

Les Gallois ont fini l'année comme ils l'avaient commencée, avec une victoire sur l'Italie 38-18 dans le match pour la cinquième place, même si ce n'était pas le même engouement que la victoire 42-0 contre les Azzurri dans le Tournoi des Six Nations en février dernier qui avait donné un excellent début à Wayne Pivac, le nouveau coach de l'équipe. Après être remontés d'un déficit de 14-0 à une avance de 19-16 en début de seconde période, les Italiens étaient pourtant bien partis pour une première victoire sur le Pays de Galles en 13 ans.

Avec la défaite 32-9 face à l'Irlande en ouverture de la compétition, les Gallois savaient qu'ils étaient sur une mauvaise pente – six défaites de suite - qu'ils devaient impérativement redresser. Et ce fut chose faite avec la victoire sur la Géorgie, 18-0, leur première victoire depuis février. Mais dès le match suivant, ils devaient essuyer une nouvelle défaite, 24-13 contre l'Angleterre.

L'Italie, toujours sans aucune victoire

L'Italie était encore en quête de sa première victoire sous l'entraîneur Franco Smith dans la Coupe d'Automne des Nations lorsque l’Écosse est venue à Florence. Si les Italiens ont mené 11-7 à la pause grâce à un essai de Matteo Minozzi, ils n'ont pu tenir en seconde période et se sont inclinés 28-17.

Après l'annulation du match contre les Fidji, les Azzurri se sont vite concentrés sur le match contre la France, perdu là aussi, pour cette septième défaite de suite avec Franco Smith.

Contre l’Écosse pour son dernier match, l'Italie n'a pu conserver son avance (18-17 au début de la seconde période) et a encaissé trois essais dans les 22 dernières minutes pour s'incliner 38-18 à Llanelli, soit la neuvième défaite de rang de l'équipe.

Un seul match pour les Fidji

Très touchés par la pandémie de Covid-19 – 22 joueurs et 7 membres du staff contrôlés positifs - qui a annulé tous ses matches sauf un, les Fidji ne sont finalement pas repartis les mains vides de cette Coupe d'Automne des Nations. Venus pour disputer quatre rencontres, il n'ont pu en honorer qu'une seule, contre la Géorgie lors de la dernière journée.

Nemani Nadolo a marqué trois essais dans cette victoire 38-24.

La Géorgie a engrangé de l'expérience

Si la Géorgie a accepté de relever le défi de la Coupe d'Automne des Nations, c'était avant tout pour engranger de l'expérience et, à ce titre, elle a réussi son engagement. Très envieuse de se mesurer à quelques-unes des plus grosses nations du rugby, elle a joué, en l'espace d'un mois, contre quatre équipes du Top 12 mondial.

Certes les Lelos ont cumulé les défaites : 40-0 contre l'Angleterre, 18-0 contre le Pays de Galles, 23-10 contre l'Irlande. Mais contre les Fidji, les Géorgiens ont moins pris la marée qu'ils ne l'avaient fait un an plus tôt en Coupe du Monde de Rugby (45-10). Les Géorgiens n'ont pas à rougir de leur défaite 38-24.