Lorsqu'il est apparu que la pandémie de Covid-19 allait toucher sévèrement l'Irlande, Su Carty a offert ses services pour aider à se battre en première ligne.

Membre du Conseil de World Rugby et de la IRFU, Su Carty était en effet psychiatre avant de basculer dans l'administration sportive en 2009. Forte de son expérience, elle a proposé ses services et son expertise à l'hôpital St-Vincent de Dublin, alors que son pays entrait dans son premier confinement.

Un mois auparavant, au mois de mars 2020, Su avait été retenue pour recevoir une Bourse de leadership octroyée par World Rugby pour l'année qui s'ouvrait. Mais elle a du mettre tous ses plans de côté pour répondre à l'appel de l'Irlande.

Entre le mois d'avril et la fin juillet, Su n'a pas compté ses heures, partageant son temps entre l'hôpital son domicile d'où elle faisait tourner son entreprise de consulting. Elle s'est rendue disponible pour assurer des plages de quatre fois douze heures chaque semaine à St-Vincent, s'occupant de patients qui étaient admis pour recevoir une prise en charge psychiatrique.

« J'ai commencé ma carrière comme infirmière psychiatre, c'est pour ça que j'ai répondu à l'appel de l'Irlande », sourit-elle. « J'adore retourner à l'hôpital, me replonger dans cette frénésie. Après les dix premières minutes de mon premier shift, c'était comme si je n'étais jamais partie.

« J'ai pris en charge des patients qui avaient besoin d'un suivi médical, mais aussi d'un accompagnement psychiatrique. Je les prenais un par un. Un jour l y en a eu un qui avait le Covid et j'étais là. Du coup, j'ai du passer mal de temps dans l'unité Covid. »

Apporter un plus

L'expérience qu'a vécu Su Carty à St-Vincent a ravivé son désir d'apporter un plus dans le traitement des maladies mentales et dans un environnement psychiatrique. Depuis cet épisode, elle est retournée dans sa maison familiale à Roscommon, où, aux côtés d'un groupe de collègues et de la Zero Suicide Alliance basée au Royaume-Uni, elle a participé au lancement d'un outil en ligne conçu pour aider à la prévention du suicide.

« Ce que les gens feraient normalement pour que leur santé mentale et émotionnelle soit prise en charge, tout ceci a disparu avec la pandémie », constate Su. « On doit remettre les choses en place, une routine ou un objectif personnel à atteindre comme faire une balade chaque matin ou faire telle chose le soir.

« Quand vous avez l'entraînement tous les mardis à 18h par exemple, ça marche tout seul. Mais avec le Covid, tout a volé en éclat et vous devez vous astreindre à des rendez-vous, sinon vous ne faites rien. Et puis, dans le contexte d'être peut-être isolé ou seul et de ne pas avoir d'interaction sociale, cela nous appelle à être un peu plus créatifs sur ce que nous faisons et ce que nous mettons en place.

« Il ne tient qu'à nous de prendre soin les uns des autres et de ne pas laisser tomber une personne dont on sait qu'elle a du mal à demander de l'aide. »

Su Carty est convaincue qu'une fois que le rugby amateur sera de nouveau en route, dans un environnement sûr, le rugby pourra à nouveau avoir un impact « massif » sur la santé mentale des gens.

« Ce qu'il y a de bien avec le rugby, ou le sport en général, c'est que ça vous donne une ligne à suivre, ça vous donne des repères », observe-t-elle.

Un parcours qui a séduit ses alter-ego

Dans le cadre de sa bourse, Su doit normalement intégrer le programme des Directeurs Agréés à l'Institut des Directeurs en janvier prochain. Mais son implication dans sa bourse cette année s'est limitée à suivre des ateliers en ligne organisés par World Rugby et à des conversations avec d'autres récipiendaires sur WhatsApp.

Ces interactions en revanche ont créé un sentiment d'appartenance à une communauté parmi les récipiendaires dont certaines ont été séduites par l'exemple de Su.

Car après avoir joué pendant 12 ans pour l'Irlande, Carty a été la dernière présidente de la Ireland Women’s Rugby Football Union, mais la première patronne du rugby féminin à World Rugby en 2009 avant de siéger au Conseil de World Rugby aujourd'hui.

Su Carty a également été arbitre et a été retenue comme assistante sur trois tests féminins entre 2014 et 2016. Elle a aussi été le mentor d'une autre récipiendaire de la bourse, María Fernanda Vázquez Villatoro, en 2019.

Malgré tout, elle balaye l'idée d'être considérée comme une pionnière dans le rugby féminin. « Je pense qu'il est un peu tôt pour me donner le trophée de Femme de ce match-là », dit-elle. Mais elle ne cache pas son enthousiasme à transmettre sa passion et sa connaissance du rugby.

« Lorsque vous acceptez des missions comme celle-ci, qu'elles soient formalisées ou non, cela fait partie de ce que vous acceptez, même si on ne vous le demande pas formellement. Et je pense que c'est formidable de faire la différence », dit-elle.

« Alors, oui, compte tenu de l'expérience et des trucs que j'ai appris, j'aime pouvoir partager cela et faire la différence pour les autres et continuer à le faire.

« Et de même, il y a des personnes au sein de tout ce groupe de boursières qui ont été impliquées à différents niveaux qui ont quelque chose à offrir et dont j'apprends aussi. Et c'est comme ça que ça doit se passer, non ? Peu importe ce que vous avez fait ou non, il y a encore beaucoup à apprendre et beaucoup à partager. C'est bien. »

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