De ce mois de juin 2006, beaucoup s'en souviennent encore. La région Auvergne accueille le championnat du monde des moins de 21 ans pour la première et la dernière fois. Deux ans plus tard, la classe d'âge aura changé, on parlera de U20. De fait, la promo U21 de cette année-là à une chose à gagner : entrer dans l'histoire.

A sa tête, on trouve les meilleurs dont Max Godemet le manager – dont l'influence sur le rugby français depuis 1987 n'est plus à prouver - puis Didier Retière et Émile Ntamack entraîneurs.

Dès le début du tournoi, l'équipe de France a enchaîné les victoires : 26-8 contre l'Irlande à Issoire le 9 juin, 32-3 contre le pays de Galles à Cournon d'Auvergne le 13 juin, 32-17 contre l'Australie à Marcel-Michelin le 21 juin en demi-finale. Il n'y a bien que contre l'Afrique du Sud que les Bleuets ont chuté : 10-14 en match de poule à Issoire le 17 juin. Les deux équipes se retrouvent pourtant en finale.

Loïc Jacquet, le capitaine de l'équipe de France, se confie alors aux équipes de l'IRB (anciennement World Rugby) de manière prémonitoire. « Comme l’Afrique du Sud, on a une chance sur deux. Chaque équipe a sa chance. On verra celui a qui a le plus envie et qui produira le meilleur rugby, le plus tranchant. C’est celui qui marquera le plus de points qui gagnera ; ce n’est peut-être pas la meilleure équipe qui gagne à chaque fois. On sait que des fois ça se passe comme ça », dit-il en pensant à la défaite en match de poule.

Beauxis, serial marqueur

Ce dimanche 25 juin 2006 à 18h, la Marseillaise est reprise avec ferveur par les 13 000 spectateurs du stade Marcel-Michelin à Clermont-Ferrand. Le Néo-Zélandais Chris Pollock a été choisi pour arbitrer la finale entre la France et l'Afrique du Sud. Il est épaulé par l'Irlandais David Keane et l'Anglais Roy Maybank.

Au cours de ce match, la différence s’est faite au pied. Dans cet exercice, Lionel Beauxis, l’ouvreur-buteur de l’équipe de France, prenait le meilleur en première mi-temps sur son adversaire en réalisant cinq pénalités (4e, 6e, 14e, 26e, 39e) pour seulement une seule pour Isma-eel Dollie (10e).

Si les Français semblaient plus incisifs que leurs adversaires, ils ne parvenaient pas à réellement mettre en danger une très bonne défense springbok. Le score à la mi-temps reflétait bien ce match âpre et serré, dans lequel aucune des deux équipes ne voulait laisser le moindre espace (3-15).

La force du public et la précision du jeu

Dans les premiers instants de la seconde période, c’était au tour des Sud-africains d’imposer leur rythme. Pour cela, ils font rentrer leur arrière, Scott Leonard Spedding (1,87 m pour 93 kg), auteur d'un doublé contre la Géorgie lors de la victoire 102-17 en match de poule. Hasard de la vie, Scott évoluera deux ans plus tard dans le championnat français (Brive, Bayonne, Clermont et Castres) et cumulera entre 2014 (année où il obtient la nationalité française) et 2017 24 sélections sous les couleurs du XV de France.

Forte sur sa mêlée, l’Afrique du Sud, par la botte de Dollie, inscrivait les premiers points de la seconde mi-temps (15-6, 53e). Les deux équipes se procuraient tour à tour leurs opportunités, sans toutefois parvenir à les concrétiser. L’atmosphère était de plus en plus tendue. L’ouvreur français, auteur aujourd’hui de tous les points de son équipe, Lionel Beauxis tapait un drop (70e), puis une nouvelle pénalité qui donnait une marge de sécurité à son équipe (21-6, 73e).

Les Français semblaient désormais retrouver de la confiance, poussés par leur public. L’essai de Pierre Spies n’arrivera que trop tardivement pour pouvoir inverser le cours du match (79e). Une dernière pénalité de Beauxis (80e) et la France tenait son premier titre mondial (24-13).

Les réactions d'après-match

« Même si on a joué tous les points au pied, le principal est de gagner », réagissait Lionel Beauxis. « On a su garder la maîtrise du ballon, les avants ont fait un gros match. C’est une grande satisfaction de battre l’équipe d’Afrique du Sud. C’est un long travail qui paye, depuis la finale des moins de 19 ans perdue à Durban contre les Blacks. Désormais mon objectif est de jouer en équipe de France.... »

« Cette victoire est la consécration d’un groupe, d’une famille », ajoutait le capitaine Loïc Jacquet. « C’est un des plus grands matchs de ma carrière. On savait qu’on avait les arguments pour gagner par rapport au premier match contre l’Afrique du Sud. Et sur terrain sec on a fait moins de fautes. »

"On a perdu contre une grande équipe. On a perdu contre le grand gagnant, mais les Springboks ont joué contre 13 000 personnes..."

Peter de Villiers

« On a été porté par le public, on avait envie d’être enfin champions du monde », abondait Émile Ntamack. « On espère que ce sera de bon augure pour les grands l’année prochaine (Coupe du Monde de Rugby 2007 en France où les Bleus terminent 4e, ndlr). J’espère que ces jeunes auront du temps de jeu dans leur club car ils ont du potentiel. Battre l’Afrique du Sud en finale, c’est légitime car nous étions meilleurs qu’eux lors du match de poule. »

Un avis finalement partagé par le capitaine de l'Afrique du Sud, le futur toulousain Chiliboy Ralepelle (25 sélections avec les Springboks) : « Je pense que l’équipe de France a bien étudié notre jeu. Par rapport au premier match, ils ont fait beaucoup moins de fautes. Nous, notre équipe s’est décomposée, nous avons commis des fautes et c’est pour cela que nous avons perdu le match, contre un très bon buteur. »

L'entraîneur Peter de Villiers, qui deviendra de 2008 à 2011 celui des Springboks, ajoute : « On a perdu contre une grande équipe. On a perdu contre le grand gagnant, mais les Springboks ont joué contre 13 000 personnes. Les Français étaient très en forme. Je pense qu’ils vont pouvoir faire quelque chose en 2007. »

Les baby Boks qui ont plus tard joué en France

Il est amusant de noter que sur les 26 joueurs composant le squad des Baby Boks cette année-là, un tiers a plus tard évolué en France : Heinke van der Merwe (Stade Français entre 2013 et 2019), Chiliboy Ralepelle (Stade Toulousain entre 2013 et 2015), Pierre Spies (Montpellier entre 2016 et 2017), Jano Vermaak (Stade Toulousain entre 2013 et 2015), Waylon Murray (Mâcon (entre 2017 et 2018), JP Pietersen (depuis 2017), Marius Delport (Dax entre 2013 et 2015), Meyer Bosman (Stade Français entre 2013 et 2018) et Wilhelm Steenkamp (Brive entre 2016 et 2017).

Ce qu'est devenu le squad de l'équipe de France en 2020

  • Laurent Cabarry (pilier) est aujourd'hui exploitant d'une carrière de pierre calcaire du côté d'Agen.
  • Florian Cazalot (talonneur, 36 sélections)
  • Thomas Domingo (pilier) est aujourd'hui entraîneur adjoint à Pau
  • Yohan Montes (pilier) joue toujours à Provence Rugby
  • Julien Tomas (demi de mêlée, 3 sélections) est entraîneur adjoint à Montpellier
  • Damien Weber (pilier) joue toujours à Blagnac et est aujourd'hui boucher-charcutier-traiteur à Colomiers
  • Guilhem Guirado (talonneur, 74 sélections) joue toujours à Montpellier
  • Arnaud Heguy (talonneur) est aujourd'hui entraîneur à Mauléon
  • Laurent Sempere (talonneur) est aujourd'hui entraîneur des avants au Stade Français
  • Denys Drozdz (deuxième-ligne) est aujourd'hui attaché commercial
  • Loïc Jacquet (deuxième-ligne, 4 sélections) joue toujours au Castres Olympique
  • Julien Le Devedec (deuxième-ligne, 11 sélections) joue toujours avec Provence Rugby
  • Fabien Alexandre (troisième-ligne aile) travaille aujourd'hui dans le transport et joue toujours en amateur à Voiron
  • Steve Malonga (troisième-ligne aile) est aujourd'hui directeur d'un supermarché près de Toulouse
  • Fulgence Ouedraogo (troisième-ligne aile, 39 sélections) joue toujours à Montpellier
  • Nicolas Bontinck (numéro 8) est aujourd'hui agent de voyage en Franche-Comté
  • Damien Chouly (numéro 8, 46 sélections) joue toujours à Perpignan
  • Fabien Cibray (demi de mêlée) est aujourd'hui entraîneur à Provence Rugby
  • Christophe Clarac (demi de mêlée)
  • Sébastien Tillous-Borde (demi de mêlée, 19 sélections) est aujourd'hui entraîneur des arrières
  • Lionel Beauxis (demi d'ouverture, 24 sélections) joue toujours à Oyonnax
  • Thierry Brana (ailier) joue toujours à Bédarrides-Châteauneuf
  • Thibault Lacroix (centre, 2 sélections) est aujourd'hui conseiller en investissement immobilier
  • Maxime Mermoz (centre, 35 sélections) joue encore
  • Arnaud Mignardi (centre, 2 sélections) va devenir entraîneur
  • Grégory Puyo (centre) joue toujours à Vienne
  • Mathieu Bourret (ailier) est aujourd'hui directeur d'une agence d'assurance
  • Jacques Boussuge (ailier) travaille aujourd'hui dans la finance
  • Florian Denos (ailier) est aujourd'hui conseiller en gestion de patrimoine
  • Yann Fior (ailier) est aujourd'hui entraîneur en course landaise et commercial
  • Maxime Médard (arrière, 63 sélections) joue toujours à Toulouse