Le 15 juin 2020 marque la fin du confinement total de l'île après 47 jours sans avoir enregistré le moindre cas de Covid-19. Même si les frontières ne rouvriront pas avant le 31 août, au moins l'île va pouvoir retrouver un fonctionnement normal... et une reprise du rugby.

L'insularité de Maurice lui a permis d'être réactive très tôt et de fermer ses frontières très vite pour faire face au mieux à la pandémie. La réactivité est le maître mot de ce confetti de l'Océan Indien de 1,2 million d'habitants sur 1 865 km2 et c'est grâce à cette capacité à réagir très vite que les dirigeants du rugby mauricien vont pouvoir reprendre leur projet olympique là où il s'est brutalement arrêté, le 18 mars 2020.

Missionnaire du Sevens dans le monde

Pour le mener à bien, ils ont misé sur un grand gaillard (1,97 m), Jean-Baptiste Gobelet, ancien international à 7 de l'équipe de France, joueur à XV pour Clermont, Biarritz, le Stade français et les Breakers de San Diego. « Je suis arrivé en 2017, juste après les USA », raconte l'ancien ailier, arrière ou centre. Il venait de consacrer plusieurs mois à des missions pour développer le Sevens un peu partout dans le monde.

Au hasard des rencontres, sa route croise celle des dirigeants mauriciens qui l'encouragent à venir voir la Coupe du Monde de Rugby à X, le World Club 10s, qui se déroule sur leur territoire. « J'ai été agréablement surpris par l'ensemble des indicateurs et par le fait que le rugby mauricien a des influences françaises, africaines et britanniques », reconnaît-il aujourd'hui. « Stabilité économique, politique avec une base rugbystique bien réelle.. Ils avaient les ressources humaines nécessaires en termes de joueurs. »

Gobelet signe pour devenir un « super » directeur technique national qui gère également le marketing, la communication, le management... Dès lors, les astres sont réunis pour mettre sur pied le Projet Olympique 2024, soit un cycle pendant lequel non seulement le nombre de licenciés va augmenter, mais où le niveau se rapprochera des plus grands.

+20% de licenciés en 2019

Depuis le lancement, l'île est passée de quatre à neuf clubs de rugby et le nombre de joueurs bondit de 20% en 2019 (700 joueurs en tout aujourd'hui). Même le nombre de joueuses de rugby a été multiplié par quatre en très peu de temps. « Mais tout reste fragile », concède le directeur technique national. Un renforcement des partenariats institutionnels et économiques s'est vite imposé.

"Rugby in Indian Ocean is exploding."

Jean-Baptiste Gobelet

« L'Océan Indien est en train d'exploser sur le rugby », assure Jean-Baptiste Gobelet, en égrenant les statistiques des autres îles autour : un millier de licenciés à Mayotte, 3 000 à La Réunion, 40 000 à Madagascar, l'arrivée des Comores... « Madagascar est dans le Top 4 du rugby à 7 en Afrique et le niveau monte encore. Il y a un bassin rugby assez fort dans l'Océan Indien. l’AROI (association du rugby de l’océan indien) a un rôle clef avec l’organisation de tournois jeunes et féminins dans la zone. Maurice est un pays émergent qui profite de la culture britannique en termes de rigueur et de mise en place de programmes sur le long terme. »

Le projet olympique inclut également de pouvoir arriver à qualifier une équipe garçons et une équipe filles pour les JO de Paris 2024. « Cela peut paraître utopique pour certains mais le but est de hisser tout le rugby local vers le haut », admet le DTN. « Mais au moins il faut pouvoir être dans le processus de qualification et de repêchage. Il faut pouvoir former les jeunes générations prometteuses et les amener à ce niveau. »

Le niveau en hausse du rugby à 7

Dans le processus figureront les Jeux olympiques de la Jeunesse qui seront organisés à Dakar, au Sénégal, du 22 octobre au 9 novembre 2022. Le rugby à 7 semble être vraiment le moteur du développement du rugby à Maurice.

"We will be able to regroup the Mauritian family around rugby. Rugby is going to restart all that..."

Jean-Baptiste Gobelet

Preuve en est son retour après 40 années d'absence au programme des Jeux des Îles de l’Océan Indien qui ont eu lieu à Maurice en juillet 2019 et où les locaux ont décroché la médaille de bronze (derrière l'or de Madagascar et l'argent de la Réunion) en s'appuyant sur les U18 qui avaient remporté le bronze un an plus tôt aux Jeux d’Afrique de la Jeunesse.

Dès lors, est-ce que la crise du coronavirus permettra de rebondir très vite ? « Dans chaque crise, le plus important est de savoir comment se relever », philosophe Jean-Baptiste Gobelet. Et de citer l'exemple des Fidji qui, six mois avant les JO de Rio, avaient été dévastés par le passage du cyclone Winston, considéré comme la plus puissante tempête de l'histoire de l’archipel. Malgré tout, par leur foi et leur résilience, les hommes de Ben Ryan avaient gagné la première médaille d'or olympique de leur histoire aux Jeux olympiques quelques mois plus tard.

« Pendant le confinement, nous avons continué à former les équipes grâce aux formations en ligne sur l'arbitrage, le coaching, le médical, la préparation physique... On a effectué un suivi des joueurs sur la préparation physique et on a surtout beaucoup travaillé sur l’administratif avec World Rugby et les ministères afin de mettre tous les dossiers à jour. On fait comme on peut et on trouve un système D. Nous allons pouvoir regrouper la famille mauricienne autour du rugby. Le rugby va faire redémarrer tout ça », insiste cet éternel optimiste.

Photo : fédération mauricienne de rugby