Le magicien, le maestro, le roi de Hongkong... Waisale Serevi multiplie les surnoms et ce mercredi 20 mai 2020, il a 52 ans ! Considéré comme l'un des plus grands joueurs de rugby à 7 au monde – si ce n'est le plus grand du haut de son mètre 69 – il fait partie de ceux qui ont réussi à faire émerger la notoriété du rugby à 7 dans le monde entier.

Sur le HSBC World Rugby Sevens Series, il a marqué 1 310 points au cours de sa carrière et un record de 297 sur les Coupes du Monde de Rugby à 7 auxquelles il a participé. Vainqueur en 1997 et 2005 avec les Fidji, il était joueur et entraîneur de son équipe en 2006, la première année où ils ont remporté le titre.

Waisale Serevi a également été pro à XV, passant par le Stade Montois et participant à trois Coupes du Monde de Rugby dans les 18 ans de sa carrière internationale (1989-2007). En 2013, il a été intronisé au World Rugby Hall of Fame.

Du fame au shame, Serevi a eu du mal à accepter l'arrêt de sa carrière de joueur. Dans le documentaire de World Rugby – Waisale Serevi : the Fijian Magician – Waisale n'élude pas ces temps difficiles où il a flirté avec l'alcool et la dépression.

Mais, plus motivant, il revient sans fard sur sa brillante carrière, de ses débuts en toute humilité au sommet de la gloire. Il raconte comment il a développé son jeu si particulier... en voulant éviter les nids-de-poule qui plombaient le terrain dans lequel il jouait au rugby.

Parce qu'il était loin d'être le plus grand de son équipe, il a réussi à s'imposer par son talent, imposant sa marque dans l'équipe et au-delà. Ce n'est qu'après deux années à s'occuper des équipements de son club qu'il a finalement eu la chance de montrer que lui aussi était capable de jouer. Sa première sélection avec les Fijian Sevens remonte à 1989 au Hongkong Sevens, un tournoi qu'il fera sien et qu'il remportera à cinq reprises au cours de sa carrière. Le 7 octobre de la même année, il gagnera sa première sélection internationale à XV contre la Belgique à Liège où il marquera un doublé dans l'écrasante victoire 76-0.

Sa rencontre avec Hongkong

« J'étais tellement excité d'aller avec Cathay Pacific en vrai parce que je n'en avais vu que des vidéos sur VHS. Et j'étais trop content d'aller jouer lorsqu'on a atterri. Je savais que c'était le bon moment pour montrer ce que je valais », raconte Waisale dans le documentaire. « On a joué en finale contre la Nouvelle-Zélande et on a perdu. C'est ce qui m'a motivé pour devenir un meilleur joueur et gagner l'année suivante. Et c'est ce qu'il s'est passé ! »

Les deux victoires des Fidji avec Serevi en Coupe du Monde de Rugby à 7 sont également intervenues à Hongkong. « Après la défaite à la Coupe du Monde de Rugby à 7 en 1993, on s'est dit 'ok, on doit continuer, travailler dur, essayer encore et gagner la prochaine'. C'est après qu'on a su que c'était à Hongkong et qu'il n'y a pas de meilleur endroit pour gagner une Coupe du Monde ! »

Les Fidji sont arrivés en finale face à une puissante équipe d'Afrique du Sud comprenant Bobby Skinstad. La victoire a été serrée 24-21 dans ce qui est considéré comme l'un des plus grands matches de Sevens de tous les temps.

« Quand on est parti à l'échauffement, l'officier de liaison m'a dit qu'il y avait un souci, que l'Afrique du Sud était en train de s'échauffer là où on avait l'habitude de nous échauffer, près du tableau d'affichage, et que les organisateurs nous demandaient d'aller de l'autre côté. J'ai dit 'pas question, on n'ira pas' et on s'est échauffé au même endroit. Je savais qu'il fallait peser sur le mental aussi.

« Ça a été un échauffement intéressant pour les deux équipes parce qu'on était l'une contre l'autre. On leur courait après et ils nous couraient après. Et lorsqu'on était en train de faire ça, avant d'aller dans le tunnel, j'ai vu les fans fidjiens. Ils brandissaient plusieurs pancartes et j'ai dit aux gars de regarder. Les pancartes nous demandaient de ramener la coupe à la maison. J'ai dit aux gars que c'était un signe et qu'on devait honorer cette demande. »

Les Fidji ont encaissé deux essais en début de rencontre et étaient menés 14-0. Serevi a appelé les siens à garder leur sang-froid et à frapper avant la pause. Marika Vunibaka a marqué le premier essai et trois autres ont suivi. 24 points sans réponse pour ramener la Melrose Cup à la maison.

« Gagner a été un honneur et un privilège pour moi ; c'était l'un des meilleurs matches que je n'avais jamais joué en Sevens. »

Un rêve devenu réalité

Waisale Serevi est revenu à Hongkong plus tard, cette fois avec une sélection mondiale à XV entraînée par Bob Dwyer qui l'a ensuite fait signer chez les Leicester Tigers pour quatre années.

Il est revenu chez lui juste à temps pour disputer la Coupe du Monde de Rugby à 7 2005 qui, une fois encore, était organisée dans son lieu fétiche. Pour Serevi, c'est comme si un rêve devenait réalité.

« Chaque fois que je monte dans l'avion ou que j'en descends, je fais une prière pour que Dieu nous protège », raconte Waisale. « Quand on est arrivé à Hongkong en 2005, j'étais en train de prier, de remercier Dieu du voyage et j'ai eu une vision : mon petit garçon, Junior, tenait la Melrose Cup. J'avais conseillé à ma famille de rester à la maison et de regarder la télévision, mais je les ai appelé pour leur dire de venir vite, que j'avais eu une vision dans l'avion et que cela n'arriverait pas s'ils ne venaient pas. Et ils sont venus ! »

Les Fidji ont remporté la finale contre la Nouvelle-Zélande 29-19. « C'était une très bonne finale car les garçons savaient que c'était notre dernier match ensemble. Quand nous avons gagné, j'ai sauté dans les tribunes, j'ai pris Junior dans mes bras et il a soulevé la Melrose Cup », dit-il.

« Beaucoup de personnes ne croyaient pas en nous, pensaient qu'on était trop vieux pour faire quelque chose. Leur montrer au retour ce qu'on avait réussi à faire m'a rempli de joie et de fierté. »

Le début des ennuis

La première expérience de Serevi en tant qu'entraîneur, alors qu'il était en pleine capacité de jouer, est survenue en 2006 lorsque les Fidji ont remporté leur tout premier titre sur le circuit mondial. Mais en avril 2009, c'est le début des ennuis. Serevi démissionne. Après une expérience avortée en Papouasie-Nouvelle-Guinée, il file à Vancouver pour jouer dans une équipe fidjienne invitée. De là, il se voit proposer un contrat pour coacher à Seattle, aux USA, où, grâce à l'aide d'un homme d'affaires de là-bas, il lance la Serevi Nation, une entreprise dont la raison sociale est de prêcher la bonne parole du rugby dans les écoles et les lycées.

Après une pige avec l'équipe nationale russe de rugby à 7, Serevi est revenu au niveau amateur, désireux de partager son expérience. « Sans le rugby, il n'y aurait pas de Serevi », reconnaît-il. « C'est un sport qui transmet tant de valeurs de respect et de camaraderie qu'il vous aide à devenir chaque jour meilleur. »