Dix ans avant d'être sacrés champions du monde à la Coupe du Monde de Rugby 2003 en Australie, Lawrence Dallaglio et Matt Dawson étaient sacrés champions du monde dans le format court du rugby, le rugby à 7. C'était à Murrayfield, le 18 avril 1993.

A cette époque, ces deux joueurs ne faisaient pas encore les gros titres de la presse, mais d'autres équipes du tournoi avaient mobilisé leurs héros. C'était le cas de l'Australie avec ses champions de 1991 Michael Lynagh, David Campese et Willie Ofahengaue. C'était aussi le cas de la Nouvelle-Zélande avec Eric Rush et Frank Bunce, mais aussi des Fidji avec « le roi du Sevens », Waisale Serevi.

Mais le moment le plus mémorable de cette Coupe du Monde, celui qui a projeté l'Angleterre du rang d'outsider à la finale, appartient à un pompier professionnel du Yorkshire, Dave Scully.

Les espoirs des Fidji s'éteignent

Sans se poser trop de questions, Scully s'est jeté tête la première contre l'attaquant géant fidjien Mesake Rasari avec une force telle qu'il a non seulement éviter d'encaisser un essai, mais a également pu libérer le ballon. L'Angleterre a joué en contre et marqué à l'autre bout du terrain pour ensuite remporté la demi-finale, 21-7.

« C'est assez ironique que ce moment ait été élu le moment le plus mémorable du match parce que je ne me souviens de rien ! », rigole aujourd'hui Dave Scully. « J'ai pris un coup sur le côté de la tête par le genou de Rasari et ça m'a refroidi sur le coup. Je n'ai compris que très tard, lors du dîner d'après-tournoi, que grâce à ça nous avions pu récupérer le ballon et remonté tout le terrain pour marquer. »

L'Angleterre avait disputé huit matches épuisants en deux jours et demi pour en arriver jusque-là, avant de jouer contre l'Australie en finale.

Avec seulement trois week-ends d'entraînement derrière eux, l'Angleterre était entrée dans le tournoi insuffisamment préparée, voire pas préparée du tout pour un tel tournoi. Cependant, leur préparation physique n'a jamais été un véritable problème.

« J'étais assez connu sur le circuit parce que je jouais dans une bonne équipe de Wakefield qui comptait des gens comme Jon Sleightholme. J'étais également très en forme – j'ai même couru à deux reprises le marathon de Londres le lendemain d'un match à XV », confie Dave Scully.

Un jeu trop loin pour l'Australie

Michael Linagh, battu en finale, se souvient toutefois de la fatigue qui a joué un rôle important dans le déroulement du tournoi. En quart de finale, l'Australie avait déjà battu l'Angleterre 21-12 à 13h avant de la retrouver trois heures plus tard en finale.

« Avec le nombre de matchs (10) que nous avons disputés en trois jours, nous étions épuisés. Le programme avait été assez intense à suivre car nous avons dû jouer la Nouvelle-Zélande et l'Angleterre coup sur coup. Je crois que ça s'est ressenti sur les résultats. Ayant battu l'Angleterre plus tôt dans le tournoi, puis perdre contre eux en finale était décevant. Ils ont très bien démarré et nous avons commencé à remonter mais nous n'avions tout simplement plus de jus pour tenir jusqu'à la fin.. Puiser dans nos réserves et tenter de revenir dans ce 10e match était tout simplement impossible. »

Pour le manager de l'équipe, Peter Rossborough, la victoire est intervenue 20 ans après avoir remporté au même endroit le tournoi International Sevens avec l'Angleterre – une version primitive de ce qu'allait donner le HSBC World Rugby Sevens Series.

« Nous pensions que si nous jouions à notre potentiel, nous aurions une chance, et il s’avère que nous avons plus que joué à notre potentiel et avons réussi à assurer la victoire », se remémore l'ancien joueur. « Le faire à Édimbourg, à Murrayfield, où nous avions remporté les premiers championnats du monde, nous a procuré beaucoup de plaisir. Il y avait une grosse ambiance de la part des Écossais. Je me souviens que nos femmes sont rentrées dans le restaurant de l'hôtel et ont commencé à chanter et les autres clients ont quitté la salle. C'était un grand week-end pour nous tous. »

Douce revanche pour Harriman

Selon Peter Rossborough, Dave Scully a été « le ciment qui a uni l'équipe ». Mais il se rappelle aussi d'un autre souvenir, mettant en scène le capitaine Andrew Harriman qui a coiffé au poteau David Campese en finale, comme si de rien n'était, pour mener au premier essai de l'Angleterre.

« Il avait joué à XV pour l'Angleterre contre l'Australie quelques années plus tôt et Campese l'avait lourdement plaqué lors de ce match avant de poursuivre sa course, le laissant là comme un c... Mais Andrew a su lui rendre la pareille lors de cette finale, il lui a fait face puis l'a coiffé au poteau à son tour. Et c'est lui cette fois qui avait l'air d'un c... », sourit Peter Rossborough.

L'ouverture du score par Andrew Harriman a été suivie par des essais de Lawrence Dallaglio et de Tim Rodber, un autre artisan de la victoire.

Luttant contre la fatigue, l'Australie n'a pas abdiqué pour autant. Menée 21-0, elle a su remonter la pente grâce à des essais de Michael Linagh, David Campese et Semi Taupeaafe. Mais Lynagh a manqué deux de ses transformations et l'Angleterre a pu conserver son avance de quatre points.

« Je suis content qu'il ne restait que deux minutes après leur troisième essai car ils étaient bien remontés », admet Dave Scully. « Lorsqu'on a entendu le coup de sifflet final, ça a été un énorme soulagement. »