Enregistrer une hausse de 100% du nombre d'adhésions en rugby féminin en Espagne au cours des cinq dernières années est un achèvement qui fait saliver bon nombre de fédérations de part de le monde. Mais cette réalisation est le fruit d'un long travail.

Le programme « Mujeres en Rugby » a été lancé en 2015 lorsque l'on ne comptait que 2 600 joueuses licenciées dans toute l'Espagne. Cinq ans plus tard, la fédération compte plus de 5 000 joueuses.

« On n'est pas encore arrivés au bout », tempère néanmoins César Archilla, responsable du développement à la Federación Española de Rugby, bloqué chez lui, du fait de la pandémie de Covid-19. « La première partie de notre plan courait sur 2015-2021 et nous voulons que le rugby féminin se porte du mieux possible d'ici à 2025. Mais rien n'est gagné, vous savez, d'autant qu'aujourd'hui nous sommes soumis à un strict confinement. C'est très compliqué. »

Forcé de se mettre entre parenthèses pour une durée indéterminée, le rugby continue néanmoins de vivre éloigné des terrains.

Conseiller auprès de plusieurs districts en Espagne, César Archilla est arrivé à la FER fin 2014, sous la présidence d'Alfonso Feijoó. Il a alors pu mettre en place un programme selon quatre piliers

  • le rugby féminin
  • une académie nationale pour les joueurs – haute performance
  • une académie nationale pour les entraîneurs, les arbitres et les personnels soignants
  • la promotion et la participation

C'est sans doute sur le dossier du rugby féminin que César Archilla a eu les retours les plus visibles. « La stratégie a été conçue pour développer tous les aspects du jeu : élever le niveau des entraîneurs et des arbitres et attirer les joueurs dès le plus jeune âge », explique le bientôt quinquagénaire.

Attirer les joueurs dès le plus jeune âge est un projet ambitieux, mais qui commence à porter ses fruits. Un nombre croissant de petits Espagnols se tournent en effet de plus en plus vers le rugby. De plus en plus de garçons et de filles jouent ensemble jusqu'à l'âge de 16 ans.

Poser des bases solides

L'internationale à XV et à 7 Patricia Garcia, ambassadrice du programme Mujeres en Rugby, n'a certes découvert le rugby qu'à l'âge adulte. Mais elle a inspiré de plus en plus de jeunes joueuses désirant faire partie de l'équipe de rugby à 7 des las Leonas qui évolue depuis plus de dix ans maintenant.

C'est le cas de Maria Garcia, qui a progressivement monté les échelons. « J'ai grandi avec cet amour du rugby et en voulant suivre les pas de mon frère », explique-t-elle. Après avoir joué dans des équipes mixtes, Maria García a rejoint l'Academia Nacional Iberdrola, où elle a commencé à s'entraîner aux côtés d'autres joueuses et il ne lui a pas fallu longtemps pour intégrer la sélection nationale. « Le rugby, c'est ma vie. C’est ce que je fais depuis que je suis enfant ; c'est mon quotidien », assure-t-elle dans une vidéo de promotion pour le rugby féminin.

Les programmes de World Rugby, tels que Get Into Rugby, combinés au travail du Consejo Superior de Deportes d'Espagne, ont également contribué à faire grandir le rugby féminin. En lien avec le programme de César Archilla, le Conseil National du Sport participe au financement de huit cadres chargés du développement du rugby féminin dans toute l'Espagne.

« Il s'agissait d'aller au-delà de ce que nous avions », explique César Archilla. « Maintenant, nous devons renforcer cette croissance. La prochaine étape est la haute performance.

« Nous travaillons avec des figures inspirantes - non seulement pour les jeunes joueuses mais pour les femmes en général dans le sport. Compter sur des personnalités qui ont participé aux Jeux olympiques, aux Coupes du monde de rugby et à ceux qui occupent des postes de décision est essentiel pour les joueuses qui progressent dans le système, car elles fixent et atteignent leurs propres objectifs.

« La compétition est également cruciale. Nous avons un championnat national de clubs avec deux divisions, des ligues régionales et des clubs locaux qui font du bon travail. »

Grandir sur et en dehors des terrains

L'objectif n'est pas uniquement d'avoir plus de joueuses, mais aussi plus de femmes parmi les entraîneurs, les arbitres, les officiels de match et les cadres dans les instances dirigeantes. Cela garantira aux jeunes joueuses de pouvoir compter sur de nouvelles figures inspirantes à tous les niveaux du jeu.

Néanmoins, dans le contexte actuel - dévastateur pour le sport en général dans le monde entier - l'objectif de 6 000 licenciées à fin 2020 pourrait ne pas être réalisé.

« Cette année, nous allons surtout travailler sur la conservation de nos joueuses », explique César Archilla. « Nous devrons attendre et voir quel impact cela va avoir sur nous. Nous sommes dans une courbe de croissance, mais il s'agit d'un programme à dix ans. Et ce n'est qu'au bout de ces dix ans qu'on pourra voir si on a réussi.

« Nous avons accompli des choses qui nous ont rendus heureux, mais l'objectif final est d'ancrer durablement le rugby féminin en Espagne. Le succès serait d’intégrer pleinement les femmes dans chaque volet du jeu dans les dix ans. »