Alicia Lucas n'est pas complètement prête à se défaire du rugby. Mais l'ancienne olympienne médaillée d'or qui avait disputé six matches avec son équipe à Rio en 2016 envisage désormais sérieusement de passer derrière le micro pour garder sa passion intacte.

Certes elle n'a pas complètement raccroché les crampons, mais en attendant de retourner sur les terrains, elle a suivi un programme de formation destiné aux sportives financé par Sport Australia en collaboration avec Brass Neck Broadcast (BNBC).

Cette formation est le fruit du travail de Jilly Collins, manager du rugby féminin et en charge de la participation à Rugby Australia, qui a trouvé là un moyen de garder dans le giron du sport les pépites qui se sont révélées au fil des ans, au-delà de leur carrière sportive.

Alicia Lucas a été l'une des sept joueuses de rugby à 7 et à XV d'Australie à avoir suivi un atelier de deux jours au Sydney Cricket Ground début février, aux côtés d'autres sportives issues du foot et du rugby à XIII.

« J'avais pensé à cette reconversion il y a quelque temps déjà, comme éventuelle carrière lorsque j'arrêterais », explique Alicia Lucas à World Rugby. « Je communique déjà beaucoup sur le terrain, j'aime faire circuler le ballon et je possède une bonne connaissance du rugby qui me permet d'analyser chaque action à bon escient.

« Je suis en quelque sorte à la fois contrôleur et chef d'orchestre et comme j'aime discuter de toute façon, la prochaine étape pour moi serait de devenir entraîneur ou commentatrice afin que je reste dans le sport, même si je n'ai plus la possibilité de jouer.

« J'ai aussi appris quelques langues - ou plutôt essayé d'apprendre quelques langues ! - pendant que je jouais. J'ai l'habitude de dire pour plaisanter que j'ai même appris le français pour pouvoir commenter les Jeux Olympiques de 2024 à Paris !

« Mais pour autant, jamais je n'aurais pensé qu'une telle chose pourrait arriver spécifiquement pour les sportives toujours en activité et qui peuvent apprendre les ficelles du métier de commentatrice grâce au programme que Rugby Australia a mis en place. »

Pas le droit à l'erreur

Alicia Lucas et ses camarades de classe – dont Millie Boyle, Emily Chancellor, Dominique du Toit, Ashleigh Hewson, Gemma Noller (née Etheridge) et Shannon Parry – ont tout de suite été mises dans le bain dès le premier jour en étant laissées seules derrière le micro.

Leurs performances et leurs expertises ont ensuite été débriefées sur la deuxième journée par des pros tels que Gordon Bray. Idéal pour gagner de l'expérience, même si la confiance en soi a pu être mise à rude épreuve sur le coup.

« Je pense que Rugby Australia a une réelle responsabilité d'accompagner les sportives pendant qu'elles sont en activité, mais aussi pour l'après rugby », explique Jilly Collins.

« Personne sur cette planète ne peut mener une carrière sportive professionnelle à vie en tant que sportif. Donc, nous devons nous assurer que nous pouvons apporter un accompagnement aux personnes concernées. Nous avons beaucoup discuté avec les joueuses pour comprendre ce qu'elles souhaitaient faire après leur carrière.

« Ce qui a été fantastique dans ce cas, c'est que nous avons pu leur offrir un programme de formation complet et une expérience pratique pour les aider dans leur développement. Et ce qu'il y a d'intéressant dans le fait de commenter, c'est que les opportunités peuvent être adaptées autour de leur propre vie. Par exemple, Alicia, Dominique et Shannon ont commenté le Super W cette année en parallèle de leur engagement à 7.

« Toutes les joueuses qui ont suivi la formation ont été très réceptives car elles souhaitent apprendre et développer leurs compétences. Il y a une chose qu'elles ont appris rapidement au sujet des commentaires, c'est que vous n'avez pas le droit à l'erreur ! »

Son rêve : commenter les JO

En Australie, Gordon Bray est considéré comme « la voix du rugby ». C'est lui qui a servi de mentor à Alicia Lucas lors de cette formation. Il se trouvait à l'étranger lorsqu'elle a fait ses débuts en direct en commentant la rencontre NSW Warratahs contre les Fijiana en février. Juste après, il s'est fendu d'un mail où il a débriefé pour elle sa prestation.

Alicia ne cache pas qu'elle était terriblement stressée avant de se lancer puis de se dire : « ok, c'est bon, j'y vais, les gens vont m'écouter... Mais une fois que vous êtes lancée, que vous êtes dans le rythme, alors tout se débloque petit à petit et vous appréciez le jeu à sa juste valeur. »

Alicia s'est retrouvée en confinement lorsque son mari Matt Lucas est revenu du Japon à la fin du mois de mars alors que la pandémie de Covid-19 sévissait dans l'hémisphère sud. Elle en a profité pour perfectionner son nouveau métier à la maison en regardant des rediff des Wallabies en 1999.

« C'est vrai que commenter des matches me plairait bien lorsque je prendrais ma retraite », dit-elle. « Mon rêve serait de commenter les JO. Et pourquoi pas la prochaine médaille d'or de l'Australie ! »