Le rugby a non seulement donné à Soledad Galleguillos un sentiment d'appartenir à une famille et les moyens de ne pas se faire intimider en grandissant, mais il lui a également apporté une vraie formation pour mieux orienter sa vie ces dernières années. Et aujourd'hui, c'est à elle de partager ce qu'elle a appris et de transmettre les valeurs du rugby à d'autres sports.

L'ancienne joueuse chilienne de rugby à sept a eu une année 2019 chargée. Elle a reçu la Bourse de Leadership féminin de World Rugby, a participé au premier forum féminin de Sudamérica Rugby à Asunción, au Paraguay, et a quitté Chile Rugby pour rejoindre le comité olympique chilien et travailler sur un événement multisports majeur qui se tiendra dans le pays.

« Il y a eu de nombreux changements dans ma vie ; je n’imaginais pas que toute ma vie serait consacrée au sport et qu’elle serait [centrée] sur le rugby », explique Soledad Galleguillos depuis Santiago, la capitale du Chili.

Son histoire dans le rugby est une succession d'étapes importantes : quand elle a joué pour la première fois, quand elle a représenté son pays, pris en charge le rugby féminin au Chili et a obtenu la Bourse de Leadership World Rugby.

« Le fait de recevoir cette bourse a été incroyable », assure-t-elle. Elle avait déposé une demande l'année précédente, même si elle pensait que son dossier n'était pas assez costaud. Mais la fois suivante a été la bonne et World Rugby l'a contactée.

« Ma détermination et mon attitude positive faisaient partie de ma préparation, [j'étais] toujours confiante en mon potentiel. J'ai pris beaucoup de temps pour ma présentation et j'ai reçu beaucoup d'aide de Catalina et Marjorie », avoue-t-elle, en référence à Catalina Palacio et Marjorie Enya, la Colombienne et la Brésilienne qui sont devenues les deux premières femmes d'Amérique du Sud à recevoir la bourse en 2018.

Renforcer la confiance

En grandissant, Soledad s'est investie dans la gymnastique à Temuco, une ville au sud de Santiago. Lorsqu'elle était âgée de 14 ans, le rugby a été introduit dans son école par un entraîneur de rugby bien connu de sa région, Cristian Isla.

« Le rugby était en cours de développement et lorsqu'on nous l'a annoncé, je me souviens clairement que c'était [pendant] un cours de mathématiques. Bien sûr, j'ai sauté sur l'occasion pour sécher le cours. Nous avons joué au rugby toucher, même si je ne savais pas vraiment ce qui se passait. » C'était en 2002, par une froide matinée.

Lorsqu'elle a ensuite été invitée à rejoindre le Club Rucamanque, Soledad Galleguillos n'a pas hésité. « Nous étions 40 filles de mon école, cinq de ma classe », se souvient-elle. « Le rugby m'a permis de côtoyer des filles plus âgées et je suis rapidement devenue populaire. Grâce au rugby, je n'ai jamais été victime d'intimidation à l'école. Et puis j'ai aussi aimé l'aspect social - la gymnastique n'a pas les valeurs ou les [activités] d'après-match du rugby... »

L'année suivante, elle s'est rendue à La Serena pour disputer un tournoi national. Elle a été alignée en tant que flanker dans une équipe d'adultes. « J'ai rencontré plus de gens et j'ai réalisé que j'étais bonne au rugby. Ça a été une expérience formidable qui m'a donné plus de confiance. »

À 16 ans, elle a été l'une des pionnières régionales à avoir participé au premier tournoi officiel sud-américain de Sevens à Barquisimeto, au Venezuela, en 2004. « Je me sentais vraiment comme une pionnière. Quand j'ai commencé, nous n'étions pas beaucoup à jouer au rugby au Chili, dans la région. En raison des préjugés, nous avons dû travailler dur pour montrer pourquoi nous voulions continuer à jouer au rugby. »

L'effet boule de neige

Pour tenter de décrire la croissance du rugby dans son pays, Soledad se réfère à une analogie. « Maintenant, je vois que c'était comme une boule de neige. Le rugby féminin a commencé à rouler lentement et, petit à petit, a pris de l'élan, a pris de la force et va continuer de grandir. Je suis fière d'avoir aidé à son développement dans mon pays et dans la région. »

À 31 ans, après 10 ans passés dans l'équipe nationale, elle a cessé de jouer en compétition et apprécie simplement de se retrouver avec des vieilles connaissances dans une équipe de rugby de plage appelée Pamelas.

Cependant, sa détermination est évidente et l’Asociación de Rugby de Santiago lui a demandé de coordonner les tournois, de développer des clubs et des dirigeants – sans rémunération - pour aider à renforcer le rugby féminin.

« Ils ont vu mon intérêt et qu'en tant que joueuse, j'en demandais toujours plus, car les clubs avaient besoin d'aide », explique Soledad.

À son retour d'un forum des femmes à Paraná, en Argentine, en 2014, on lui a proposé un poste à temps partiel en tant que responsable du développement. Physiothérapeute de métier, elle a partagé son temps entre le rugby et son travail dans les gymnases.

Enfin, en 2017, elle est devenue employée à temps plein à la Federación de Rugby de Chile. Elle est partie en août 2019 pour rejoindre le Comité olympique chilien.

« J'aide maintenant de toutes les manières possibles, en tant que mentor et consultante. Je viens de cesser d'entraîner car mon rôle ne me laisse plus trop de temps », regrette presque Soledad Galleguillos.

Dans sa volonté d’aider les autres, elle a récemment voyagé en Uruguay pour profiter du Championnat Sudamérica féminin à sept depuis les tribunes et a fini par travailler avec le Costa Rica en tant que physio.

La bourse

C'est à sa deuxième tentative qu'elle a donc reçu la Bourse de leadership World Rugby. Son objectif est clair : travailler aux Jeux panaméricains de Santiago 2023. En attendant, elle se concentre sur la maîtrise pour laquelle elle étudie dans une université locale et qui s'achèvera en décembre 2020.

Outre son master, elle utilisera les fonds de sa Bourse pour voyager en Europe. « Je suis très amie avec l'autre boursière sud-américaine, l'Argentine Lettizia Alcaraz, et nous allons combiner nos voyages pour les rendre plus rentables. »

Ensemble, elles commenceront en Espagne, où « nous rencontrerons un certain nombre d’institutions qui nous inspireront en matière de leadership et de gestion selon mes objectifs, et de coaching pour Letti. Mon objectif est de devenir un leader du management d'ici 2023. »

Le voyage se terminera à Dublin où, pendant deux semaines, elle suivra des cours intensifs en Anglais, suivra World Rugby dans des visites et des sessions « pour apprendre comment le rugby est géré depuis la World Rugby House ».

Tirant le maximum de sa Bourse, Soledad se rendra aussi à Tokyo l'année prochaine pour les Jeux Olympiques.

« Les quatre éléments de mon plan et de mon projet se sont complétés, ce qui fait de moi une meilleure professionnelle dans la gestion des sports, du rugby et en tant que personne », admet Soledad Galleguillos. « Je veux maintenant aider d'autres femmes de la région à acquérir cette Bourse. »

Même si elle n'est plus impliquée dans le rugby au quotidien, elle est loin d'en être partie complètement : « Je ressens un engagement encore plus grand pour le rugby, de pouvoir offrir encore plus ».