TOKYO, le 25 octobre – L’éclosion de Makazole Mapimpi a été aussi fulgurante que ses courses sur l’aile droite des Springboks. Il y a trois ans, il n’était qu’un joueur parmi tant d’autres en première division, aux Border Bulldogs. Son salaire était également celui d’un joueur classique évoluant dans son pays.

Mapimpi a toujours eu cette accélération brutale, ce goût pour la ligne d’essai. Mais il n’était pas forcément bien-né. En grandissant à Mdantsane, une petite bourgade du Cap-Oriental, il n’était pas prédestiné à enfiler le maillot des Boks.

Une éclosion tardive

Loin des radars, il n’a jamais fréquenté d’école de rugby ni attiré l’œil d’un recruteur. Dans sa famille, le rugby n’est pas un sport populaire. « Dans ma famille, personne n’a joué au rugby. Je suis le premier et le seul », confie l’ailier.

Il a fallu attendre 2017 pour que Mapimpi découvre le Super Rugby. Il a alors… 27 ans ! L’ailier s’est fait repérer avec les Southern Kings en inscrivant 11 essais (en 14 matches), devenant le troisième meilleur marqueur de la saison.

Des faillites financière et sportive qui profitent au joueur

La carrière de Mapimpi a pris un tournant décisif en 2014 grâce à… la faillite de son club. Alors aux Border Bulldogs, il voit de nombreux joueurs partir et se retrouve avec un nouveau statut. Très vite, les essais s’enchaînent.

Après les ennuis financiers de son premier club, ce sont les problèmes sportifs de sa franchise qui vont accélérer sa carrière. Évincés du Super Rugby faute de résultats suffisants en 2017 – lorsque le Super Rugby est passé de 18 à 15 franchises –, les Southern Kings ont dû se séparer de certains joueurs, dont Mapimpi, qui rejoint les Cheetahs, autre équipe éjectée du Super Rugby. Mais après une demi-saison convaincante sur le plan individuel (10 essais en 13 matches), il retrouve les lumières nationales avec les Natal Sharks.

« Si vous regardez les deux ou trois dernières saisons de Makazole en Super Rugby et Pro 14, vous verrez qu’il était toujours parmi les meilleurs marqueurs, glisse Mzwandile Stick, entraîneur adjoint des Boks. Quand il était aux Southern Kings, il marquait des essais même si son équipe perdait. Même chose quand il a rejoint les Cheetahs et il confirme maintenant aux Sharks. »

13 essais en 12 matches

Désormais bien installé avec les Springboks, Mapimpi a inscrit 13 essais en … 12 sélections ! Sur l’année civile, il est le meilleur marqueur en équipe nationale avec 9 réalisations. Seul le Japonais Matsushima fait aussi bien que lui sur la période.

Les deux hommes sont d’ailleurs les meilleurs marqueurs d’essais dans cette Coupe du Monde avec 5 voyages dans l’en-but adverse, à égalité avec l’ailier gallois Josh Adams. Adams – Mapimpi, les deux hommes seront opposés ce dimanche à Yokohama pour un duel qui sent la poudre.

Son essai face au Japon montre toutes les qualités du joueur. Un chasseur d’essais aux appuis de feu. Derrière une mêlée dominatrice, sa vitesse et sa puissance lui permettent de déposer Tamura et de marquer malgré un ultime plaquage japonais.

Finisseur, Mapimpi est aussi un opportuniste. Pour son deuxième essai face aux Brave Blossoms, il a profité d’un ballon de récupération pour marquer sur un contre de 70 mètres. La percée de Pollard fait une première différence tandis que le dragster profite de la fatigue adverse pour régler tout le monde à la course sur une dernière passe de Le Roux. Vitesse et endurance, deux atouts de Mapimpi.

Homme de stats

Face au Japon, Mapimpi a conclu la rencontre avec 111 mètres ballon en main, cinq défenseurs battus, quatre franchissements et deux essais. Personne n’a fait aussi bien sur cette rencontre dans les différentes catégories statistiques.

Un coup de maître qui n’était pas un coup d’essai puisqu’il est, avec 332 mètres parcourus ballon en main, le joueur le plus en vue dans ce domaine depuis le début de la Coupe du Monde, devant l’arrière gallois Liam Williams (310).

Toujours contre les Brave Blossoms, Mapimpi a prouvé qu’il n’était pas qu’un attaquant flamboyant. C’est aussi un défenseur sérieux, comme le prouvent ses 10 plaquages. Une performance qui le place dans une caste très restreinte puisque seulement trois autres joueurs (Lienert-Brown, Himeno et Mallia) ont réussi au moins 100 mètres et 10 plaquages en un match dans cette Coupe du Monde.

S’il a mis du temps à éclore, Mapimpi balaie tous les doutes un par un depuis son arrivée au plus haut niveau. « Pour être honnête, on ne savait pas trop comment il s'en sortirait quand sa chance viendrait. On l’a vu déchirer les défenses avec les Kings puis les Cheetahs mais on ne savait pas ce qu’il pouvait donner dans les autres secteurs, reconnaît Stick. Les joueurs venus des zones rurales jouent peu au pied. Mais il a beaucoup travaillé et s’est amélioré. »

Parti de tout en bas, Mapimpi pourrait, dans moins de 10 jours, se hisser au sommet du rugby mondial. Il prouverait alors, une fois encore, que rien ne sert de courir, il faut partir à point.

RNS dc/bo/fl/sc