Imaginer les All Blacks reconquérir leur titre de Champions du monde lorsqu'ils iront au Japon au mois de septembre prochain, c'est ne pas oublier non plus la pression incroyable que l'équipe a subi lors du tournoi mondial chez eux en 2011.

Quatre ans plus tôt, ils s'inclinaient piteusement face à la France en quart de finale et ce mauvais souvenir était encore dans toutes les têtes, tandis que les images du triomphe inaugural de 1987 s'étaient évanouies.

Ainsi, lorsque Dan Carter a été obligé de déclarer forfait sur blessure à un moment où le capitaine Richie McCaw lui-même ne s'en sortaient pas de ses blessures aux pieds, rien ne semblait épargner les joueurs, le staff et le doc de l'équipe, Deb Robinson.

L'hécatombe de 2011

« Nous subissions une pression incroyable et surtout d'un point de vue médical car nous avions perdu plusieurs joueurs d'un seul coup (avec l'abandon de Colin Slade aussi, ndlr », se souvient Deb Robinson. « On avait toujours l'habitude de dire en allant à une Coupe du Monde que s'il y a bien deux personnes qu'on ne voulait pas voir blessées, c'est bien Dan et Richie. Et ce sont eux qui étaient justement blessés ! C'était tellement stressant ! »

McCaw a bien cru à une fracture du pied avant les demi-finales contre l'Australie, mais Robinson – avec qui il avait travaillé pendant dix ans avec Canterbury, les Crusaders et les All Blacks – l'avait rassuré et lui a permis de jouer.

« Nous étions sûrs d'une chose, c'est que je n'allais pas le mettre dans une situation qu'il allait payer pendant longtemps », insiste Deb Robinson. « C'était à lui de prendre la décision. Si il le sentait, il pouvait y aller. Les sélectionneurs pouvaient le retenir en fonction de ce qu'ils constataient sur le terrain pour savoir s'il pourrait tenir ou non. »

Clairement, Graham Henry et son staff ont été rassurés de le voir à l'entraînement et McCaw fut sélectionné à la fois pour la demi-finale victorieuse sur les Wallabies et la finale haletante contre la France, disputant 80 minutes à chaque rencontre.

Un chemin sinueux

Pour Robinson – qui avait déjà vécu la désillusion de Cardiff en 2007 – aider les All Blacks reste l'un des points d'orgue de sa carrière dans le rugby qui a débuté à Canterbury en 2001 et s'est poursuivie jusqu'au sacre des Black Ferns à Belfast en Coupe du Monde de Rugby Féminin en 2017.

« Aller jusqu'au bout et décrocher le titre mondial a été un moment de fierté car le tournoi n'avait pas été simple », se rappelle le médecin de l'équipe. « Au fil du temps, on oublie combien c'était difficile pour se concentrer uniquement sur les bons moments. Mais lorsque je jette un regard en arrière, je ne peux pas m'empêcher de me rappeler de ces petites inquiétudes au moment des blessures qui nous ont rendu la tâche très difficile. »

Le chemin qu'avait emprunté Deb Robinson vers la Coupe du Monde n'avait pas été nécessairement le plus direct. Lorsque Rob Campbell a mis fin à son aventure de médecin d'équipe avec Canterbury et les Crusaders en 2001, c'est sa consœur qu'il a voulu pousser pour prendre sa suite.

Robinson avait déjà une certaine expérience en matière de médecine sportive, ne serait-ce qu'en hockey et netball. Au netball, elle avait d'ailleurs joué avec l'épouse de Steve Hansen qui, à ce moment-là, était le coach de Canterbury et l'assistant des Crusaders. C'est Hansen qui l'a incité à postuler, lui certifiant qu'elle serait la meilleure personne à ce poste. Aux côtés du capitaine Todd Blackadder, le futur entraîneur des All Blacks l'a aidé à s'installer.

« Sa bienveillance, ainsi que celle de Todd Blackadder, a été primordiale dans mon arrivée dans le rugby », assure Robinson. « C'était la dernière année de Todd à Canterbury et il m'a accueilli à bras ouverts, jusqu'à venir à l'avant du bus pour me dire bonjour ! Je pense que ces gars-là, tout simplement leur personnalité et leur façon d'être, ont été cruciaux dans mon intégration. »

Autour de la table du Conseil de World Rugby

"Some of the women [on the Council] are just amazing. I think rugby’s really lucky about the calibre of woman who has now become involved. Both from a practical sense but also from an experience sense."

Deb Robinson

 

L'arrivée de Deb Robinson dans le rugby pro a été couronnée de succès. Lors de sa première saison, Canterbury a remporté le championnat national des provinces. Et lors de sa deuxième saison, les Crusaders ont remporté le Super Rugby.

De toutes les Coupes du Monde qu'elle a vécu, aussi bien avec les All Blacks que les Black Ferns, l'édition 2007 est la seule qu'elle n'a pas gagné.

« J'ai eu tellement de chance d'évoluer dans un tel environnement où on a gagné tellement de matches », sourit-elle. Mais ce n'est pas une question de chance si tant de rencontres ont été gagnées, mais bien le résultat d'un lourd travail, d'une solide préparation et de cette façon de gagner la confiance des gens qui travaillent avec elle.

« Je savais que si ma méthode de travail était bonne et que si j'arrivais à bien communiquer avec les uns et les autres, alors ma tâche serait facilitée », dit-elle. « J'ai fait en sorte de remplir ma mission du mieux possible. »

Cette détermination reste intacte aujourd'hui, au moment où elle devient la première représentante féminine de New Zealand Rugby au sein du Conseil de World Rugby. Elle est l'une des 17 nouvelles membres à avoir été invitées à siéger en 2018.

« Certaines de ces femmes sont impressionnantes », assure-t-elle. « Je pense que le rugby a beaucoup de chance avec ces profils-là ; grâce notamment à leur expérience. »