Emma Jensen a mis fin à sa longue et fructueuse carrière de joueuse sous les couleurs de son club de Hawke’s Bay. La triple championne du monde de rugby a maintenant l’occasion de dessiner un avenir au rugby féminin dans sa région d’origine.

Emma Jensen, 43 ans, a en effet été élue au conseil d’administration de Hawke’s Bay Rugby au début du mois de mars 2021, alors qu’elle avait annoncé vouloir raccrocher les crampons à la fin de la Farah Palmer Cup l’an dernier.

C’est le sens du devoir qui l’a ramenée chez elle en 2018, après deux décennies passées à Waikato puis à Auckland. Plus que jamais, elle entend aujourd’hui contribuer à augmenter le nombre de joueuses dans sa région, ne serait-ce qu’en facilitant les passerelles entre l’enseignement du rugby au lycée et le rugby élite.

« Je voulais redonner au rugby ce qu’il m’avait donné, sous une forme ou sous une autre », confie-t-elle à World Rugby. « Je voulais apporter ma pierre et j’ai entendu parler de cette élection (au conseil d’administration, ndlr). J’ai alors pensé que je pourrais proposer une perspective tout à fait différente en ce qui concerne ce que les membres du conseil ont déjà fait, en raison de ma carrière et de ma capacité à jouer.

« J’aime avoir une vue d’ensemble de là où les choses se font, là où Hawke’s Bay Rugby va, où on en est, où on se situe avec New Zealand Rugby. »

Augmentation du nombre de joueuses

La décision de s’éloigner du jeu a été prise afin de consacrer plus de temps à sa jeune famille. Car Emma est une jeune maman de deux petites filles âgées de deux ans et de cinq mois. Elle est aussi directrice adjointe dans un lycée pour filles.

Emma Jensen entraîne également à l’école de Hastings et a commencé à prendre en main des joueuses de 16 ans à son club pour faciliter leur transition entre le niveau junior et le niveau senior.

« Ce que j’aimerais vraiment voir en termes de rugby en général, c’est l’augmentation du nombre de joueuses et surtout qu’elles restent, en particulier dans nos classes juniors », insiste Emma.

« Lorsqu’elles quittent le lycée, trop souvent elles décrochent. Si nous avons plus de joueuses qui pratiquent, alors on peut arriver à créer un environnement compétitif qui va élever le niveau. Et par conséquent, les joueuses voudront vraiment tout donner pour le jeu. »

Le WXV, une opportunité immense pour la Nouvelle-Zélande

Depuis qu’elle s’est saisie de son premier ballon de rugby à l’âge de 15 ans, c’est exactement ce qu’a fait Emma : se donner à fond. Elle a rapidement été prise dans l’équipe féminine de Hawke’s Bay et plus tard a excellé pour Waikato et Auckland, ainsi qu’avec les Black Ferns.

La demi de mêlée a déménagé à Auckland, où elle a passé 14 ans, principalement pour qu’elle puisse jouer aux côtés d’Anna Richards (membre du Hall of Fame de World Rugby) et qu’elle poursuive ses ambitions internationales.

C’est un pari qui a porté ses fruits, car Jensen a remporté 49 sélections avec les Black Ferns et a représenté son pays à quatre Coupes du Monde de Rugby, remportant trois d’entre elles.

Sa plus grande réussite sur un terrain de rugby reste la finale de la Coupe du Monde de Rugby 2010 au Twickenham Stoop, dans laquelle la Nouvelle-Zélande a réduit au silence une foule partisane pour l’emporter 13-10 sur les Anglaises.

« L’ambiance du match était énorme », se souvient Emma. « Nous faisions le Haka et le public chantait 'Swing Low, Sweet Chariot'. Ça symbolisait tellement notre rivalité avec l’Angleterre. Et c’était tellement bien de les battre chez elles ! »

Cette rivalité pourrait d’ailleurs vite reprendre du service sur la scène internationale à partir de 2023. Mardi 16 mars 2021, World Rugby a en effet annoncé le lancement du WXV, une toute nouvelle compétition féminine mondiale.

Emma Jensen a salué la nouvelle, qui garantirait l’entrée de la Nouvelle-Zélande dans deux nouvelles compétitions : le WXV et un tournoi de qualification avec l’Australie, le Canada et les États-Unis.

« Cela nous ouvre des portes en termes d’exposition des filles sur les test-matchs », dit-elle. « C’était évidemment un problème pour nous car nous n’en avions presque pas. À mon époque avec les Black Ferns, il y avait des années où on avait un ou deux matchs par an, puis on arrivait à une année de Coupe du Monde où on avait peut-être cinq matchs. Et la plupart de ces rencontres étaient pendant la Coupe du Monde, justement.

« C’est pour ça qu’en termes d’opportunités de jeu et d’exposition, ce serait énorme pour la Nouvelle-Zélande, parce qu’on touchera plus de filles là-bas et on pourra faire venir les meilleures dans l’équipe. »

La prochaine génération

Dans son rôle d’entraîneure à la Hastings Girls' High School, Emma Jensen est aux premières loges pour apprécier la qualité des joueuses issues du système en Nouvelle-Zélande.

Et en ce sens, elle est confiante dans le fait que les Black Ferns seront bien préparées pour engranger plus de matchs dans les années à venir.

« Il y a une très bonne génération de jeunes filles à venir, ce qui est génial pour le rugby néo-zélandais », remarque-t-elle. « Il y a tellement de talents et je le vois à travers les lycées ici. »

Si ses deux filles décident un jour de suivre les traces de leur mère, alors elles n’auront pas à chercher loin un entraîneur. « Elles seront probablement obligées de jouer au rugby ! », rigole Emma.

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