Lorsque Mike Adamson arbitrera à Twickenham le match des Six Nations entre l'Angleterre et l'Italie dans moins de quinze jours, ce sera un moment important pour le rugby écossais, et pour lui aussi sur le plan personnel.

En décembre dernier, la nouvelle de sa nomination pour le match est venue comme un coup de pouce bienvenue après la déception du match annulé entre l'Angleterre et les Barbarians qu'il devait justement arbitrer. Pour la Scottish Rugby Union, cette annonce fut un moment décisif.

Car, aussi incroyable que cela puisse paraître, 19 ans se sont écoulés depuis que Rob Dickson a été le dernier arbitre écossais à prendre en charge un match masculin des Six Nations.

« C’est évidemment très long à venir et ça n'a pas été faute d’essayer. C'est juste, pour plusieurs raisons, que nous n'avons pas été en mesure d'y plus tôt », admet Andrew Macpherson, directeur du développement des arbitres de la SRU et entraîneur des arbitres de haute performance. « C’est bien de pouvoir se débarrasser de ce fardeau et enfin d’obtenir cette reconnaissance pour le travail qui s’est poursuivi ces dernières années pour y arriver. »

Pendant une brève période au début de la carrière de Rob Dickson en test, lui et l’arbitre chevronné de la Coupe du Monde de Rugby Jim Fleming ont tous les deux représenté l’Écosse sur la scène internationale.

Mais après en avoir eu deux au sommet en même temps, le stock d’arbitres de ce niveau en Écosse s’est vite tari. En 2013, cependant, l'arrivée du célèbre officiel sud-africain, Tappe Henning, en tant que commissaire d'arbitrage, a changé la donne.

« Entre Tappe, Dave Pearson (ex-arbitre RFU) et moi-même, nous avons pris la responsabilité de l'entraînement des arbitres d'élite. Grâce à leur expérience d'arbitrage international, Tappe et Dave ont beaucoup apporté », explique Andrew Macpherson. « La plus grande chose que nous ayons changé et sur laquelle nous avons travaillé est probablement de nous assurer que notre philosophie de coaching soit en ligne avec World Rugby, l'EPCR, le PRO14, etc., donc que nous étions pleinement en phase.

« La détection de talents a été importante aussi pour nous assurer de pouvoir compter sur un vivier important de personnes de sorte qu'on n'attende plus 19/20 ans entre les convocations pour le Tournoi des Six Nations. Nous disposons d'un panel national d'arbitres qui sont beaucoup sur nos compétitions nationales. Puis nous avons une équipe de développement avec qui nous travaillons en lien avec les clubs locaux pour nous aider à identifier les futurs arbitres. »

Des débuts modestes

Alors qu'Adamson était bien connu dans le rugby écossais grâce à ses exploits en tant que joueur avec Scotland Sevens et en tant que vainqueur de la National Cup avec les Glasgow Hawks, Andrew Macpherson aura été l'une des rares personnes à être témoin de ses débuts au centre du terrain.

Diplômé de l’université de Glasgow, le parcours d’arbitre d’Adamson a commencé par une rencontre en milieu de semaine, entre les vétérinaires et les infirmiers de l’université de Glasgow.

« J'ai arbitré Mike quand il jouait, et quand il est arrivé vers la fin de sa carrière de joueur, il m'a contacté et je suis descendu le voir faire un match à l'Université de Glasgow. Je m'en souviens très bien ; il faisait un froid glacial, c'était un lundi soir de novembre », raconte Macpherson, qui en était à sa cinquième année en tant qu'arbitre à plein temps.

« Personne n'avait entraîné Mike mais je pouvais voir qu'il y avait là quelque chose de naturel et une prise de décision assumée dans son arbitrage. Nous sommes restés en contact tout le temps quand il est passé du jeu à l'arbitrage. Je pense que son expérience de jeu l'aide vraiment en tant qu'arbitre dans le sens où il comprend très bien le rugby, la lecture du jeu et ce que les équipes essayent de faire. Pour Mike, il s'est simplement agi simplement de saisir les opportunités. »

Mike Adamson est passé de joueur à arbitre quelques mois avant son 30e anniversaire et reconnaît qu'acquérir une connaissance encyclopédique des règles et savoir quand les appliquer a été le défi le plus difficile au départ.

« Quand j'étais joueur, je pensais que je comprenais les règles à 100%. Mais lorsque vous devenez arbitre, vous réalisez que vous n'en connaissez probablement que 70 à 80% », dit-il. « Même sur le terrain maintenant dans le rugby professionnel, les joueurs viennent vers vous et vous posent des questions sur certaines règles qu'ils pensent connaître, mais vous devez essayer de leur dire 'non, en fait ce n'est pas comme ça'.

« Au début, vous avez tendance à sur-arbitrer un peu le match parce que vous avez toutes ces nouvelles connaissances sur les règles et que vous les appliquez probablement trop à la lettre. Il s'agit simplement de trouver un équilibre entre connaître les règles, puis savoir quand siffler et quand ne pas siffler. »

Un début qui n'est pas passé inaperçu

Après avoir reçu des retours positifs sur ses premières performances, les grandes opportunités ne se sont pas faites attendre pour l'ancien demi d'ouverture.

Membre de la West of Scotland Referee Society, l'officiel de match né à Stirling a fait ses débuts en PRO12 en 2016, et plus tard cette année-là, il a décroché un billet pour les Jeux olympiques de Rio, où il a arbitré la victoire 20-5 des Fidji contre le Japon en demi-finale hommes.

Ses débuts en test à XV en tant qu'arbitre ont eu lieu l'année suivante, puis, en mai 2019, il a été convoqué pour prendre en charge la demi-finale Leinster v Munster PRO14.

Le match Angleterre v Barbarians aurait dû être son match international le plus en vue à ce jour, mais bien que cette opportunité soit tombée à plat, les convocations pour la Heineken Champions Cup et le match Géorgie v Fidji lors de la dernière journée de la Coupe d'Automne des Nations lui ont permis de montrer de quoi il était capable.

Compte tenu des conditions difficiles à Murrayfield et de la rudesse des Fidji, le match a finalement été très divertissant et Mike Adamson en est ressorti avec beaucoup de crédit.

« Je suppose qu'après la déception de l'annulation du match entre l'Angleterre et les Barbarians, c'était une autre bonne opportunité qui s'est présentée assez rapidement. Parfois, vous ne savez pas quand la prochaine arrivera, donc c'était agréable », confie-t-il.

« Avec l’équipe fidjienne, vous ne pouviez pas savoir ce qu'ils allaient faire exactement parce qu’ils étaient en quarantaine jusqu'alors et n’avaient pas encore joué. Mais les équipes sont sorties et ont joué un bon rugby et les mêlées étaient bonnes. C’était un domaine que j’avais identifié comme étant un défi dans ce match et quelques pénalités que j’ai infligées au début ont apparemment vite réglé le problème. »

Peu de temps après, Mike Adamson a appris sa convocation historique pour le Tournoi des Six Nations après avoir reçu un appel téléphonique du manager des officiels de World Rugby par intérim, Paddy O’Brien.

« C'était une très belle surprise et évidemment quelque chose que j'attendais avec impatience. J’ai joué et arbitré à sept à Twickenham et c’est un endroit vraiment génial. »

Effet boule de neige

Ayant grandi à Dollar, à l’est de Stirling, Mike Adamson a probablement rêvé jadis de marquer des essais dans le Six Nations, dans ce temple du rugby anglais, plutôt que de les accorder comme l'avaient fait avant lui Jim Fleming et Rob Dickson.

« Je ne pense pas que j'avais leur portrait accroché sur les murs de ma chambre ; j'avais plutôt les posters d'Andrew Mehrtens, de Craig Chalmers et de Gavin Hastings. Je ne pense pas que quiconque ait jamais grandi en voulant être un arbitre. Je pense que c'est juste quelque chose qui arrive, comme ça. »

Pour l'Écosse, ils n'étaient pas nombreux avant qu'Adamson ne s'impose petit à petit avec ses autres collègues arbitres Hollie Davidson, Sam Grove-White et Ben Blain.

« Ça a longtemps été difficile de passer la barre, mais maintenant que j'entre dans le Six Nations, j'espère qu'il y aura un effet boule de neige et que nous aurons constamment des gars arbitrant des matches internationaux de très haut niveau. »

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