A la fin de l’année 2013, certains voyaient déjà Dave Rennie, sept ans plus tard, disputer son premier match de la Bledisloe Cup… mais sous les couleurs des All Blacks. Wayne Smith était de ceux-là, lui qui était convaincu que Rennie ferait un excellent sélectionneur de l’équipe de Nouvelle-Zélande.

L’ancien prof n’avait-il pas mené les Chiefs vers une deuxième victoire en Super Rugby, justement au côté de Wayne Smith, avec qui il avait permis aux Baby Blacks d’enchaîner les victoires en Championnat du Monde des Moins de 20 ans entre 2008 et 2010 ?

Dave Rennie semblait alors taillé pour le job. Mais à la place, c’est la direction de l’Écosse qu’il a prise pour encadrer les Glasgow Warriors en 2017 où il a vécu trois saisons émaillées de victoires et de trophées.

L’appel des Wallabies

Mais en novembre 2019, à la suite de la sortie de l’Australie en quart de finale de la Coupe du Monde de Rugby 2019, l’opportunité de remplacer Michael Cheika s’est présentée. Rennie a accepté la proposition et, à la fin du mois de mai, ce grand gaillard de 56 ans a quitté l’Écosse pour devenir le deuxième kiwi – et le premier avec un héritage polynésien ! - à prendre en charge les Wallabies.

La pandémie de Covid-19 l’a empêché de montrer tout de suite ce qu’il pouvait apporter. Il aura fallu attendre le mois de septembre pour avoir un aperçu en découvrant la composition du groupe de 44 joueurs qu’il avait retenu pour la saison à venir et au-delà.

Beaucoup aimeraient tellement que les Wallabies battent les All Blacks dimanche à Wellington puis à Auckland six jours plus tard alors que les Néo-Zélandais seront sans conteste favoris pour le prochain Super Rugby qui va débuter en novembre.

Rennie n’a pas caché son étonnement de voir son alter-ego des All Blacks se passer des services du troisième-ligne des Chiefs Lachlan Boshier lors du match entre l’Île du Nord et l’Île du Sud. « Il n’a même pas été sélectionné dans l’équipe du Nord ! Ça dit bien où en sont les réserves du rugby en Nouvelle-Zélande », a-t-il confié. « Mais à la fin, ils ne peuvent mettre que 15 joueurs sur le terrain. Alors on va travailler dur pour mettre en face une équipe qui pourra rivaliser. »

Le groupe que Dave Rennie a constitué comprend 16 joueurs non capés et dix autres qui ne comptent que neuf sélections maximum. Il s'agit, pour l'ancien coach des Chiefs et de Glasgow, d'un plan à trois ans devant emmener ses joueurs à la victoire de la Coupe du Monde de Rugby 2023 en France.

Mais la bonne nouvelle pour les Wallabies est que Rennie traîne derrière lui une belle réputation de gagneur. « Enseigner, entraîner, c'est la même chose. Les gamins sont juste un peu plus grands », disait-il en 2013.

Constituer une équipe de vainqueurs

Dave Rennie avait un peu levé le voile sur son approche avec les Chiefs après leur titre de champions du Super Rugby en 2013. Il avait alors déclaré que l'équipe « avait toujours eu quelques vedettes, mais manquait d'un peu de travailleurs ».

Ce n'est pas vraiment le cas avec les Wallabies. Michael Cheika, son prédécesseur, avait tout misé sur le défi physique, sur l'attaque, un peu sur le modèle que Rennie avait mis avec succès en pratique pour les Chiefs, d'ailleurs.

Si bien que Dave Rennie a une base solide de travail au moment d'attaquer avec l'Australie et qu'il dispose de quelques stars – le capitaine Michael Hooper, James O'Connor et Marika Koroibete pour ne citer qu'eux – autour desquels il peut construire une équipe tournée vers le travail et l'attaque.

Dave Rennie n'a pas eu peur de se séparer de quelques gros calibres à l'image de Isi Naisarani, Jack Dempsey et Tevita Kuridrani. Par contraste, il parie sur toute une nouvelle génération dont certains membres ont brillé avec les Junior Wallabies sur le Championnat du Monde des Moins de 20 ans.

Sa propre expérience avec ce tournoi devrait rassurer les Fraser McReight, Noah Lolesio et autres. Rennie a remporté trois titres de champions du monde avec les Baby Blacks pendant les trois ans où il était leur entraîneur. C'est avec lui que se sont révélés par exemple Sam Whitelock, Aaron Smith, Ryan Crotty, Aaron Cruden, Julian Savea, Sean Maitland et tant d'autres.

Plus récemment, avec les Glasgow Warriors, Rennie a permis à Scott Cummings, Adam Hastings et George Horne de sortir du lot et de devenir des titulaires indiscutables à l'international. Son projet, c'est justement de faire émerger les talents.

« Il y a beaucoup de choses qui m'ont surpris dans le rugby australien », a-t-il confié dans l'édition d'août de Rugby World. « On doit pouvoir changer la perception qu'on en a en faisant, pas en disant. Et ça commence en haut pour nous. Nous souhaitons créer une bonne cohésion avec les coaches du Super Rugby et leur staff, c'est très important. Mon rôle avec les Wallabies va bien au-delà de l'équipe, il permet d'établir des connexions fortes avec les équipes jeunes et de détecter des talents. Une partie de mon travail consiste aussi à aider les entraîneurs australiens à émerger. »

La façon dont les Wallabies vont jouer ce dimanche 11 octobre 2020 à Wellington va donner une bonne indication de la tâche qui attend Dave Rennie. Et une victoire dans les deux prochaines semaines ne pourrait que donner un signal positif.

Pourtant, même deux lourdes défaites ne détourneront pas le Néo-Zélandais de sa mission de mettre sur place un groupe de jeunes joueurs pour remporter la Coupe du Monde de Rugby.

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