Il y a un an, la Canadienne Alana Gattinger devenait la deuxième femme nommée manager d'équipe, à l'occasion de la Coupe du Monde de Rugby 2019, et la première seize ans après Louise Ramsay qui avait accompagné l'Angleterre championne du monde en 2003.

Et aujourd'hui, Maria Gallo aimerait bien voir la même chose se produire dans le monde encore très masculin des entraîneurs de rugby de haut niveau où les femmes sont quasi inexistantes, non pas parce qu'elles n'en ont pas les capacités, mais simplement par manque d'opportunités.

Née en Argentine, l'ancienne internationale du Canada est l'une des femmes sélectionnées par World Rugby pour intégrer des stages pour entraîneures en vue de la Coupe du Monde de Rugby 2021.

« Il y a 12 femmes qui vont participer à ce nouveau programme et beaucoup d'entre nous vont travailler avec les sélectionneurs des équipes féminines, qui sont pour la plupart des hommes », constate Maria Gallo. « J'espère que nous pourrons ainsi montrer que les femmes peuvent également faire partie d'un staff de haute performance, et pas seulement en tant qu'adjointes. Avec un peu de chance, ça peut ouvrir les yeux de pas mal de jeunes filles qui peuvent en faire leur carrière professionnelle. Ce n'est pas qu'un univers réservé aux hommes.

J'ai hâte de voir ce qui va ressortir de cette initiative. Je suis contente de cette nouvelle opportunité de développement professionnel. Et c'est cool aussi de se dire que je vais être en Nouvelle-Zélande pendant toute la durée de la Coupe du Monde ! Une fois qu'on y sera, je pense qu'il y aura bien d'autres opportunités de voir comment un tel tournoi se déroule en termes de communication, de marketing, d'opérations et de management. »

Au cours des 18 derniers mois, Maria a travaillé en tant qu'entraîneure-adjointe de l'équipe féminine à XV du Canada au côté de Sandra Fiorino. Jeune mère de famille, elle est aussi et avant tout professeur agrégée à temps plein à l'École de kinésiologie de l'Université de la Colombie-Britannique. De fait, son temps est précieux, mais elle soutient que le rugby et l'entraînement feront toujours partie de sa vie.

« Être membre à temps plein de la communauté universitaire demande beaucoup de temps et d'énergie, de même qu'être parent, mais je voudrais toujours garder une place pour le coaching dans ma vie, quelque soit le niveau », dit-elle. « J'ai toujours voulu faire beaucoup de choses dans ma vie. Je ne me vois pas entraîneure à temps plein, mais j'aime bien la façon dont ça complète ma vie universitaire. »

Après avoir servi pendant deux années comme entraîneure-adjointe auprès des Thunderbirds féminines à l'Université de Colombie-Britannique (UBC), Maria Gallo a postulé pour le poste d'entraîneure en chef et a tout de suite mené l'équipe à XV aux play-offs de la conférence et a remporté le championnat national de rugby à 7. Elle a par la suite été nommée entraîneure de l'année dans l'Ouest du Canada.

Forte de ses 55 sélections en temps que joueuse internationale, elle a continué à l'UBC avant de décrocher le poste avec l'équipe nationale. Désormais, elle refuse de fermer la porte à la moindre opportunité malgré son agenda très rempli.

« Je pense que le programme de haute performance va me permettre de m'améliorer dans les domaines où j'en ai besoin et peut-être qu'un jour je pourrais entraîner l'équipe nationale », espère-t-elle. « Il ne faut jamais dire jamais et je ferais tout pour m'ouvrir des opportunités et y arriver. Je ne vais pas m'en empêcher. »

Cette façon de voir les choses rappelle son côté « sans peur » qu'elle avait en tant que joueuse ou lorsqu'elle pratiquait le bobsleigh. « Une des mes coéquipières de rugby à ce moment-là faisait la route pendant trois heures entre Edmonton et Calgary et m'a proposé un jour de venir avec elle », raconte Maria Gallo.

« J'ai commencé à m'entraîner un peu avec elle et j'ai beaucoup aimé. Ça a plu au sélectionneur de l'équipe du Canada et je me suis entraînée avec eux un bon moment, pendant une saison et demie. C'était génial et parfaitement complémentaire avec ce que je faisais sur un terrain de rugby. C'est pour ça que j'ai continué aussi longtemps que j'ai pu. J'ai adoré partir en tournée avec l'équipe et faire quelques courses.

« Mais en plus de jouer au rugby et de faire du bobsleigh, j'étais à l'école supérieure, à essayer de terminer mon doctorat. J'aurais bien aimé faire partie de l'équipe pour les Jeux de Turin (Jeux Olympiques d'hiver) en 2006 mais j'ai pris la décision de poursuivre mes études et le rugby. Le bobsleigh, c'était juste comme ça. »

Même si rien ne remplace la sensation de glisser sur de la glace à 150 km/h, l'adrénaline déchargée lors d'un match de rugby lui a également procuré énormément de bons moments. Depuis ses débuts contre les USA en 1999, elle a passé 11 années au sommet et participé à trois Coupes du Monde de Rugby à XV, ainsi qu'une à 7, marquant cinq essais en un match contre l'Espagne lors de l'édition 2006 à Edmonton.

« YouTube n'a pas gardé beaucoup de traces de ce que j'ai fait ce jour-là, mais je pense qu'on peut encore trouver des images sur internet », rigole-t-elle. « Du moins, il y en a assez pour que mes étudiants me les ressortent de temps en temps. Ces vidéos me poursuivent, mais c'est sympa. »

Maria Gallo était bien plus qu'une réalisatrice. Elle savait parfaitement comment évoluer sur un terrain de rugby et s'engager dans un match. « J'ai grandi avec deux grands frères et ça a en quelque sorte forgé mon agressivité dans le rugby. Avec eux, c'était un peu marche ou crève », se souvient-elle. « Ça a un peu déteint sur moi, je pense. J'aimais bien plaisanter à l'entraînement et passer un bon moment, mais ensuite, au moment du match, je basculais en mode guerrière. »

Maria a converti ses belles-sœurs au rugby et son mari, Dean Murten, un Anglais, a pris la relève en tant qu'entraîneur des Thunderbirds. Bref, le rugby a joué un grand rôle dans sa vie et Maria ne le renie pas.

« En tant que sportive, j'étais attirée par l'aspect physique et cérébral du sport ; je devais prendre des décisions en une fraction de seconde sous la pression », remarque-t-elle. « En tant qu'entraîneure, j'aime décomposer les actions et être dans l'analyse. Une chose qui m'attire dans le rugby, c'est à la fois sa complexité et sa simplicité. Et, d'un point de vue holistique, pour moi, le rugby est une sorte de famille. »