Entraîner les Springboks est l'une des missions sportives les plus difficiles au monde tant la pression est intense et les attentes sont grandes. Mais Rassie Erasmus, Entraîneur World Rugby de l'Année 2019, n'a jamais douté de sa capacité à mener l'Afrique du Sud au titre suprême, même en prenant le poste seulement en mars 2018, l'année d'après son embauche en tant que Directeur du rugby, même après une période difficile sous Alistair Coetzee et alors que tout le monde l'attendait au tournant.

Rassie Erasmus connaissait l'équipe dans ses moindres détails du fait de son poste de conseiller technique à la fédération sud-africaine de rugby, ainsi que coach des Cheetahs, de la Western Province et des Stormers qu'il avait mené jusqu'en finale du Super Rugby en 2010.

« Un an avant (la Coupe du Monde), c'est un peu court pour appeler un nouvel entraîneur », rappelait-il peu de temps après être revenu triomphalement du Japon. « Mais j'étais dans le système depuis 1994 lorsque le rugby est devenu professionnel. J'ai connu toutes les étapes du professionnalisme et je suis devenu entraîneur après avoir joué. »

Une arrivée en pleine crise

La tentative d'Allister Coetzee de repositionner les Springboks sur l'attaque n'a connu que des succès relatifs. Une défaite 57-0 contre les All Blacks n'est qu'une illustration du travail qui leur restait à faire ; c'était l'une des 11 défaites en 25 matches en 2016 et 2017.

Néanmoins, lorsqu'Erasmus est arrivé, il n'a pas jeté aux orties la totalité de l'héritage Coetzee. Il a conservé les bonnes choses et a renforcé les fondamentaux qui ont fait la réputation des Springboks par le passé : une solide culture d'équipe, une grande puissance physique et un sang-froid qui les distinguent des autres nations du monde.

L'Afrique du Sud s'est bornée à ne rien changer à ses plans de jeu malgré les critiques qui ont fusé avant de se rendre au Japon. « Il avait un plan et il s'y est tenu du début à la fin du tournoi », se rappelle l'ancien ailier Akona Ndungane. « Les médias ont reproché aux joueurs d'avoir trop recours au jeu au pied et prétendaient que le plan de jeu était trop ennuyeux. Mais aujourd'hui, personne ne se souvient du nombre de coups de pied que Faf a tapé. »

Un faux conservateur

Il serait pourtant incorrect de classer Rassie Erasmus parmi les conservateurs. Innovant avec les Cheetahs, on se souvient qu'il avait dirigé un entraînement assis sur le toit du stade de Bloemfontein en utilisant des lumières de couleur différentes pour faire passer ses consignes à ses adjoints et aux joueurs. Il a également reçu le surnom de « DJ Rassie ».

« C'est un type très intelligent et hyper organisé », a dit de lui Dave Wessels, l'entraîneur des Melbourne Rebels qui a travaillé dans son ombre au début de sa carrière. « Il était à fond dans les statistiques et les données. Mais je pense que son secret est qu'il est charismatique. Lorsque les gens regardent les Springboks aujourd'hui, ils voient une équipe qui prend du plaisir à être ensemble, qui adore le rugby et où tout le monde travaille dur pour l'autre. Il a réussi à apporter tout ça au groupe grâce à sa personnalité.

« Il n'a pas changé les règles. Lui, son job, c'est de gagner en suivant les règles qui lui sont imposées. A certains moments, on lui a reproché son conservatisme, mais ça a pourtant marché et je suis sûr qu'il a sué sang et eau pour en faire une équipe qui gagne. Je pense que là où Rassie a été très bon, c'est sur le timing. Il est arrivé au bon moment pour rassembler l'équipe et faire en sorte qu'elle atteigne son apogée au bon moment. »

Une question d'influences

Convaincu que son équipe devait être pleinement acclimatée avant son match d'ouverture de la RWC 2019 contre les All Blacks, Erasmus a fait en sorte que les Springboks soit la première des vingt équipes à arriver au Japon pour le tournoi. Et il s'est fait la promesse qu'elle serait aussi la dernière à partir.

Passer neuf semaines ensemble aurait pu être un enfer, mais Erasmus a tout fait pour que tout se passe bien au sein de cette équipe multiculturelle et où toutes les différences se côtoient.

« Je voudrais que les joueurs aient le sentiment que nous sommes pleinement engagés les uns envers les autres parce que nous ne voulons pas nous décevoir les uns les autres », a-t-il dit un jour.

Quant aux principales influences qui l'ont guidé lors de sa transition réussie de joueur à entraîneur, Erasmus a déjà évoqué celles de Nick Mallett et de Peet Kleynhans.

Jouer sous les ordres de Mallett lors d'une série de 17 tests sans défaite a aidé Erasmus à développer ses connaissances du sport et peut expliquer son esprit d'analyse astucieux. Quant aux compétences de motivation, elles sont à attribuer à Kleynhans.

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