A 26 ans, Babalwa Latsha n'est pas encore arrivée à la moitié de sa carrière. Auréolée du prix de meilleure joueuse d'Afrique du Sud en 2017, la pilier est la capitaine de son équipe depuis 2019.

En 2020, elle est devenue la première joueuse d'Afrique à devenir professionnelle... mais en Espagne, pour le compte de Eibar Rugby Taldea. Elle a déjà marqué 13 essais en sept rencontres pour sa nouvelle équipe et a vu son contrat renouvelé pour une nouvelle saison.

Face aux critiques

Babalwa est née dans le township de Khayelitsha, à Cape Town, et a d'abord jouer au rugby par simple curiosité avant d'en tomber vraiment amoureuse. « Jouer au rugby n'a jamais été l'aboutissement d'une décision mûrie, ça a toujours été un hasard », confie-t-elle à World Rugby. « Deux filles m'ont proposé d'intégrer leur équipe et ça a piqué ma curiosité. J'y suis allée et c'est comme ça que j'ai commencé.

« Ce qui m'y a fait rester plus longtemps que je pensais, c'est que je m'y suis sentie chez moi. Il s'est tissé un lien fort avec ces filles-là, dans cette structure de jeu. Et c'est à partir de ce moment-là que j'ai voulu vraiment m'investir plus sérieusement. »

Babalwa admet qu'elle a dû combattre quelques stéréotypes et autres critiques pour s'imposer dans cette carrière de rugby qui s'ouvrait à elle. « Quand vous êtes différente, disons un peu plus musclée que la moyenne, que vous pratiquez un sport qui est à dominante masculine – ce qui n'est pas très féminin pour le coup – vous vous exposez aux critiques, vous essuyez parfois des insultes et parfois on vous rejette, même », dit-elle.

« Mais ça m'a fait le cuir et désormais je n'accorde plus d'importance à ce genre de critiques qui s'adressent souvent aux joueuses de rugby. La passion m'a aidé à poursuivre et le rugby a vraiment eu un impact sur le cours de ma vie. »

Babalwa a même du composer entre sa carrière et ses études, ce qui n'a pas toujours été très facile à conjuguer. « Je me souviens d'une fois où nous étions en tournée et j'avais du apporter mes cahiers et mes livres avec moi. Mais jongler entre les entraînements, les études et les matches, ça n'a pas été très facile », concède-t-elle.

Inspirer d'autres filles

Babalwa a pu intégrer le tout nouveau programme de développement de la South African Rugby Legends Association's (SARLA) en 2014. Et forte de son expérience, elle souhaite ardemment que se développe le rugby féminin dans le monde entier. Pour cela, elle pense qu'une approche basée en priorité sur le secteur amateur pourrait être bénéfique.

« Nous devons avoir des stratégies en place qui soient dédiées au développement et à la croissance du rugby féminin », assure-t-elle. « Il faut que les filles puissent occuper l'espace et qu'elles soient elles-mêmes en charge de ce développement partout dans le monde. Rien n'est impossible et ça a déjà été fait à certains endroits. Si une personne peut le faire, une autre peut le faire aussi et toute une génération après ça. »

Babalwa sait trouver les mots pour inspirer d'autres filles à suivre ses pas. « Je suis intimement convaincue que dans toute joueuse de rugby se cache un géant endormi qui attend juste d'être réveillé, d'être ramené à la vie. On a toutes le feu sacré en nous et j'incite les futures joueuses de rugby à ne pas avoir peur de cette puissance qu'elles ont en elles, de ne pas craindre de la mettre en pratique. »

Elle a mené son équipe à se qualifier pour la Coupe du Monde de Rugby 2021 en Nouvelle-Zélande et a hâte d'y être. « C'est mon objectif dans un avenir proche », assure-t-elle.