TOKYO, le 20 octobre - Aaron Smith a reconnu que la victoire des All Blacks sur l’Irlande était l’un des plus grands moments de sa carrière et que le XV du Trèfle n’avait pas pu s’extirper de « l’orage parfait » qu’avait fait tonner au-dessus de sa tête l’équipe de Nouvelle-Zélande samedi, en quarts de finale de la Coupe du Monde de Rugby 2019.

Modeste, Smith n’a pas tiré la couverture à lui quant à ce succès. On peut pourtant manifestement penser que par ses initiatives, il a été l’œil de la tempête, manœuvrant avec une sérénité et une précision chirurgicale la victoire des siens 46-14. Ses deux essais personnels (photos ci-dessus et ci-dessous), où il s’extirpe du ruck, en vitesse puis en puissance, exprime l'amplitude de son bagage technique.

Une telle performance rappelle qu’à l’évidence, Aaron Smith reste à 30 ans, le meilleur demi de mêlée au monde. Une classe indéniable qu’il a dédiée à son jeune fils de deux mois à peine. Il reconnaît que son nourrisson l’a aidé à se transcender, sa fiancée Tegan Voykovich ayant emmené leur petit Luka voir pour la première fois son père en action sur le terrain.

« J'ai essayé de livrer un bon match en l’honneur de mon petit garçon, explique Smith. C’est la première fois qu’il voyait un match en tribune, je pouvais sentir sa présence. Tegan était là ce soir, mon petit garçon aussi, je suis vraiment content de mon match. J’espère qu’un jour, il pourra en être fier, et que je pourrai lui dire ‘tu étais là, petit homme, c’est toi qui m'as aidé à aller chercher cette victoire ce soir-là’. »

Pour sa 90ème sélection, la double morsure du cobra Smith s’est avérée décisive. Elle a rapidement mis la Nouvelle-Zélande hors de portée de l’Irlande, grâce à une défense all-black intraitable et une attaque multipliant les combinaisons alternées, ballons portés et jeu au large.

Smith avoue que l’inspiration de ces essais est aussi venue du visionnage qu’il a fait de certaines de ses performances récentes. « J’ai mis beaucoup de préparation dans la manière dont je voulais impacter le jeu, en regardant beaucoup de séquences se déroulant autour des regroupements au sol. »

« Je me fais souvent critiqué pour ne pas courir plus, mais je suis toujours prêt à le faire quand c’est nécessaire. Je cherchais des ouvertures pour mes coéquipiers, mais en faisant ça, j’en ai créé une pour moi-même (sur le premier essai où il bénéficie d’un trou dans la défense à la suite des ballons portés de ces avants). Le deuxième était plus improvisé (sur celui-ci, il se faufile côté fermé). Je suis très content de les avoir marqués. »

Plusieurs joueurs parmi les All Blacks auraient pu prétendre au titre de Joueur du match, finalement attribué pour la deuxième fois de la compétition à Beauden Barrett. L’ouvreur Richie Mo’unga a parfaitement dirigé la manœuvre, Sevu Reece a été très constant sur les deux ailes, le capitaine Kieran Read et son compère de troisième ligne Ardie Savea ont été colossaux, le pilier Joe Moody a joué avec un turbo.

Pour autant, Smith a joué avec tellement de vitesse et de précision, mettant un rythme effréné durant toute la partie et une telle pression sur la défense, qu’il aurait pu être l’heureux élu.

« Il sait bousculer la dynamique de défense d'une équipe, précise Mo'unga admiratif. Parce qu’ils doivent tout d’un coup s'adapter à un n° 9 comme ‘Nugget’, qui est aussi dangereux qu'un avant. C’est juste très bien joué de sa part de voir ces trous et de savoir s’engouffrer dedans.»

Smith aide aussi à élever le niveau de jeu de ses partenaires. « On se sentait frais et on avait faim, commente-t-il. Il y avait beaucoup de nervosité et de tension. On s’est mis une grosse pression pour être prêts. On a fait un gros travail mental. C’était peut-être le coup de boost qu’il nous fallait. »

RNS ic/bo/lc/mp