Le long week-end – une étape de trois jours au lieu de deux habituellement pour les World Series – avait pourtant mal commencé pour l'équipe de France de rugby à 7. Comme pour Sydney, les Bleus étaient tombés dans la poule de l'Argentine, des Fidji et des Samoa pour démarrer. L'entame contre l'Argentine tourne court sur le score 26-7 (essai de Candelon transformé par Bouhraoua). Pas idéal pour se mettre en confiance.

Deuxième rencontre, deuxième défaite, bien plus large cette fois : 42-12 contre les Fidji qui allaient remporter le tournoi deux jours plus tard. Malgré tout, les Français s'accrochent (essais de Dall'Igna et Cler avec une transformation de Bouhraoua) mais doivent faire avec une inquiétude de poids : le capitaine Terry Bouharoua, touché au genou, vient de jouer là son dernier match du tournoi. Après Sydney, les Français en sont alors à sept défaites d'affilée. « Les Français n'ont pas sombré. Après le premier jour j'étais inquiet », admet le commentateur Nicolas Dupin de Beyssat.

"Le rugby français fait des exploits quand il est dans une dynamique positive ; rarement quand c'est une dynamique négative."

Nicolas Dupin de Beyssat

Une réaction d'orgueil

La première journée catastrophique augure une autre pas si évidente. Pourtant, le match contre les Samoa – troisième et dernier match de cette Poule C – va se transformer en festival pour les Français malgré une entame là encore inquiétante. « Ils ont eu une réaction d'orgueil pendant le match des Samoa où ça s'engage très mal, où on a l'impression qu'ils sont en train de lâcher complet les premières minutes », déplore le commentateur. Et finalement Candelon marque, puis Laugel, puis Barry qui s'offre un doublé et enfin Retière. Le score s'envole : 17-31 pour les Français qui respirent à nouveau. 

« Pour moi le match-clé c'était l'Argentine : tu le perds, tu sombres mentalement car tu sais que c'est le match-clé qui te fait basculer en Cup. Tu sais que si tu l'as perdu, derrière il y a les Fidji et qu'il faut faire un exploit, mais tu n'es pas prêt pour ça. Le rugby français, en tout cas à 7, fait des exploits quand il est dans une dynamique positive, rarement quand c'est une dynamique négative », analyse Nicolas Dupin de Beyssat.

« Mentalement ils ont pris un gros coup sur la tête avec sept défaites de suite avant de retrouver les Samoans qui ont tapé les Fidji ; il n'y a pas les bons ingrédients. D'autant que les deux premières minutes c'est à sens unique : les Samoans montent vite, ils ont tous les ballons... Et malgré ça, il y a eu une vraie réaction d'orgueil. Il n'y a pourtant pas les joueurs qui sont des match-winners avec Vakatawa qui n'est pas là et Bouhraoua blessé. C'est une réaction du collectif car il n'y avait ni le surpuissant, ni l'ultra-véloce. Au bout de deux minutes, les mecs sont plus agressifs, mais plus agressifs ensemble. »

« Il était temps qu'on se réveille »

Dès lors, la machine est enclenchée. Cette première victoire de poule pousse les Français vers la Bowl. Le quart est remporté sur l'Angleterre avec un score serré 21-19. La victoire fait du bien au moral. Pour les demi-finales, c'est la Russie, de plus en plus performante, qui se dresse face aux Tricolores. Le match est équilibré jusqu'à cet essai dans les dernières minutes qui place les Russes devant. « Il y a un dernier ballon, il reste 20 secondes, Candelon a l'air serein et on se dit qu'ils vont le marquer, cet essai. Ils font stratégiquement des choix de petits tas qui ont failli coûter cher, mais heureusement que Retière a les cannes », raconte Dupin de Beyssat.

Essai, Arthur Retiere, Russie v FRANCE

Arthur Retière délivre l'équipe qui l'emporte sur le fil, au-delà de la sirène, 15-14. « Mais on les sent plus sereins sur une fin de match où ils ne jouent pas leur vie. Ils ont la balle de match et ils la mettent. Il était temps qu'on se réveille, au moins mentalement. »

La défaite contre le Pays de Galles en finale de Bowl, malgré Guitoune qui signe son premier essai en Series, plante la France à la 10e place du tournoi. L'honneur est sauf, mais l'avenir reste inquiétant. Car sur terrain synthétique les joueurs ont souffert. Trop tôt pour évaluer l'étendu des dégâts, mais le tournoi de Vancouver, les 12 et 13 mars, s'annonce charnière.